Philippe Cornet
Philippe Cornet Journaliste musique

20.30 BE 1

DE MARTIN SCORSESE.

Si Mick reste devant le projo plus de 18 secondes, il va cramer.

Comment ça, cramer?

C’est trop chaud, il va brûler. Avec des flammes, et tout?

Il va prendre feu. C’est exclu. On ne peut pas faire cramer Mick Jagger. »

Il y a quelques moments drôles dans le film de Marty Scorsese, notamment ce dialogue, visiblement écrit, entre le réalisateur et un assistant qui vient l’alerter sur la puissance de feu de l’éclairage des deux shows des Stones au Beacon Theatre new-yorkais à l’automne 2006. La scène suivante, en découvrant le barnum bordélique qui squatte la scène, Charlie Watts demande, candide et interloqué:  » C’est l’équipement cinéma habituel? » Et puis tout le monde, Marty compris, attend la finalisation de la set-list, attribut suprême de Mick. Les premières minutes du film sont du documentaire scénarisé où Marty reste fidèle à lui-même: une permanente boule de nerfs d’autant plus électrifiée qu’il va plonger dans les 220 volts stoniens. Le tout, quand même très chic, comme le prouve cette séquence où Bill Clinton  » et la mère d’Hillary » posent pour les photographes avec le groupe. C’est la version rock new-yorkaise de Maurane chez Albert & Paola. On rigole! C’est nettement plus trash avec les blagues de Keith qui le font beaucoup rire, lui ( » Eh Clinton, ferme ta Bush »). Une fois le gratin réchauffé, les mains serrées, commence – enfin – le rock’n’roll. Dans l’intimité somptueuse du Beacon – 3000 places -, le groupe anglais trouve l’espace adéquat à sa mécanique d’obédience jaggerienne: sur l’ouverture Jumpin’ Jack Flash et le suivant Shattered, Mick mange la scène comme s’il sortait d’un long régime sans concerts.

Feu sacré

Toute cette gymnastique pour sexagénaires s’honore bien évidemment d’autres plans stoniens: Ron Wood, le plus souvent concentré sur son jeu, Charlie tout étonné d’être là (extraordinaire regardfatigué face caméra à la fin d’un morceau) et puis Keith, plus que jamais roi du pétrole. Toujours dans ses bacchanales vestimentaires de pirate de luxe, il s’empare du chant sur deux titres forcément au bord de la déroute contrôlée. Scorsese cadre le groupe et ses invités – Jack White, Buddy Guy, Christina Aguilera – à l’artillerie lourde, les caméras sur travelling entrant régulièrement dans le champ. C’est propre, puissant et un brin nostalgique puisque le film est épicé d’une poignée d’archives où Keith – une nouvelle fois – prend la tête du peloton. Ce n’est pas forcément du grand Scorsese – trop contrôlé pour l’être – mais les Stones y exposent une vitalité et une inspiration qui tutoient le surnaturel…

Philippe Cornet

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