LA FASSBENDER ADDICTION

L’ACTEUR BRITANNIQUE EST PHÉNOMÉNAL DANS DEUXFILMS MAJEURS DE CE DÉBUT D’ANNÉE, SHAME, DE STEVE MCQUEEN, ET A DANGEROUS METHOD, DE DAVID CRONENBERG.

SHAME DE STEVE MCQUEEN. AVEC MICHAEL FASSBENDER, CAREY MULLIGAN, JAMES BADGE DALE. 1 H 40. DIST: TWIN PICS. – A DANGEROUS METHOD DE DAVID CRONENBERG. AVEC KEIRA KNIGHTLEY, MICHAEL FASSBENDER, VIGGO MORTENSEN. 1 H 36. DIST: TWIN PICS.

En plus d’imposer définitivement Ryan Gosling, 2011 fut aussi l’année Michael Fassbender, l’acteur britannique se révélant tout simplement impérial dans les différents registres qu’il eut à aborder, qu’il évolue en mode super-héros dans X-Men: First Class, ou dans les habits plus classiques seyant à une relecture du Jane Eyre de Charlotte Brontë. A quoi allaient s’ajouter deux rôles d’exception, découverts lors de la même Mostra de Venise: celui de Carl Jung engagé dans un fascinant « ménage à trois intellectuel » (suivant l’expression de David Cronenberg) avec Sabina Spielrein et Siegmund Freud dans A Dangerous Method, et, bien sûr, Brandon Sullivan, l’inoubliable sex-addict du Shame de Steve McQueen, ces deux films bénéficiant aujourd’hui d’une sortie DVD simultanée.

Shame est assurément l’un des films les plus forts que l’on ait pu voir récemment. Déjà auteur du non moins saisissant Hunger (avec le même Fassbender), Steve McQueen y emboîte le pas d’un trentenaire new-yorkais, wonder boy peuplant sa solitude d’un rapport compulsif au sexe sous ses formes les plus diverses, solitaire, tarifé, online, et coups d’un soir si affinités, mais à l’abri, toujours, de l’ombre d’un sentiment. Horizon/obsession que vient bousculer sa s£ur (Carey Mulligan), chanteuse déboulant dans son existence toute fragilité dehors.

C’est à un voyage au pays du sexe triste que convie ici McQueen, dans un film à l’esthétique aussi maîtrisée que glacée, ballotant le spectateur à la surface des dérives du monde. Soit l’histoire d’une désagrégation en marche, pour un film au propos aussi lucide qu’acéré, £uvre puissante et percutante, magistralement soutenue par l’interprétation de Fassbender, et complétée par un long entretien avec son réalisateur.

Le film-synthèse de Cronenberg

Il est également largement question de sexualité dans A Dangerous Method, de David Cronenberg, qui voit le réalisateur canadien ausculter la relation entre Sigmund Freud (Viggo Mortensen) et Carl Gustav Jung, les pères de la psychanalyse. Le pivot du film est toutefois un troisième personnage, Sabina Spielrein (Keira Knightley), jeune femme d’origine russe souffrant de violents accès d’hystérie, et hospitalisée dans la clinique suisse où officie Jung. Lequel va voir en elle la patiente idéale pour expérimenter les théories de Freud.

Partant, le film y trouve sa double ligne de force, le débat théorique foisonnant en découlant étant bientôt mis à l’épreuve d’une passion que Jung tente à grand peine de réprimer. Quant à Cronenberg, il fait son miel d’un tel sujet, s’insinuant avec bonheur dans les méandres de la psyché non sans, au-delà de son classicisme apparent, signer une sorte de film-synthèse de son oeuvre, brassant des thématiques familières, au croisement des pulsions de sexe et de mort. Du grand art, que prolonge un entretien captivant avec le réalisateur qui y évoque aussi bien sa méthode de travail que… La Strada de Fellini.

JEAN-FRANÇOIS PLUIJGERS

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