Rien ne t’appartient

Depuis le décès de son mari, Tara perd pied. Assaillie de visions et de vertiges, voilà trois mois que son esprit lui échappe. Les apparitions d’un jeune homme surgi de son passé se font plus pressantes. Elle est seule à le voir, à savoir qui est « le garçon ». Elle est aussi la seule à savoir qui se cache derrière Tara, ce prénom d’emprunt emporté avec elle lorsqu’elle a fui un pays libéré des colons, puis englouti par un tsunami.  » Ici dehors, c’est pareil, je suis sur la crête d’une falaise. (…) Jamais personne ne m’a expliqué ce que c’est qu’être une fille dans ce pays. » Bercé par une écriture ouvertement lyrique, le nouveau roman de Natacha Appanah brosse le portrait brisé d’une « fille gâchée » dont les parents (un père opposant politique, une mère « sorcière ») ont été sauvagement assassinés. Au coeur des épreuves où son héroïne sera tour à tour dressée comme un chien méchant puis placée dans un refuge et traitée comme un être sans volonté ni intelligence, la romancière mauricienne ne se départit jamais d’un style éminemment poétique. On pense par moments à Léonora Miano ( La Saison de l’ombre) dans la façon dont douleur et douceur traitent en secret avec l’invisible. Sensible mais moins incarné, on peine à retrouver dans ce court récit fragmenté le souffle romanesque de Tropique de la violence.

De Nathacha Appanah, éditions Gallimard, 160 pages.

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