LE TANDEM RODRIGUEZ-MILLER SIGNE UN NOUVEAU COCKTAIL EXPLOSIF DE VIOLENCE GRAPHIQUE AU CASTING VÉNÉNEUX. PLAISIR (À PEINE) COUPABLE.

Sin City: A Dame to Kill For

DE ROBERT RODRIGUEZ ET FRANK MILLER. AVEC EVA GREEN, MICKEY ROURKE, JESSICA ALBA. 1 H 42. SORTIE: 17/09.

7

Convaincu que l’industrie hollywoodienne ne serait jamais foutue de traduire en langage cinéma l’essence même de son Sin City, relecture personnelle et hyper stylisée du polar hard boiled dans la grande tradition chandlerienne, Frank Miller a longtemps refusé que sa série culte de romans graphiques soit déclinée sur grand écran. Jusqu’au jour où Robert Rodriguez, fan frappadingue de son oeuvre, n’arrive à le convaincre qu’il maîtrisait les codes et la technologie pour rendre la chose enfin possible. En 2005, les deux larrons signaient ainsi en tandem un premier Sin City visuellement bluffant, et tout à fait fidèle à l’esprit de l’original. Succès critique et public à la clé.

Il aura malgré tout fallu attendre neuf ans pour lui voir succéder ce Sin City: A Dame to Kill For, nouveau condensé nerveux de violence graphique inédite au casting imposant. Aux quelques incontournables du premier épisode qui reprennent du service -Jessica Alba, Mickey Rourke, Rosario Dawson, et même Bruce Willis de retour en fantôme- s’ajoutant en effet une volée de nouvelles têtes -Josh Brolin, Joseph Gordon-Levitt, Ray Liotta, Jeremy Piven, Juno Temple, et jusqu’à Christopher Lloyd ou Lady Gaga- emmenées par une Eva Green particulièrement généreuse de sa personne.

Noir comme le souvenir

A nouveau, le film se compose de plusieurs micro-récits reliés entre eux par un fil rouge sang parfois ténu, certes, mais assurant la parfaite cohérence de l’ensemble, les différentes pièces du puzzle narratif une fois imbriquées composant invariablement le visage du vrai personnage principal de la saga: Basin City, ville du péché gangrénée jusqu’au trognon.

Un poil rabâché sur le fond, carrément jouissif sur la forme, ce deuxième volet de l’adaptation des comics de Miller nous refait ainsi avec bonheur le coup du mix détonant de romantisme à l’ancienne et d’action bas du front stylisée, donc assumée comme telle. Un film où les souvenirs des personnages sont des impasses que sans cesse ils ressassent… avant de se mettre joyeusement sur la tronche, et où les femmes sont bien sûr terriblement fatales, les flics super véreux et les gros durs sensibles à souhait. Soit, au fond, les codes les plus éculés du film noir classique, mais largement exacerbés dans un noir et blanc classieux où les gerbes de couleur ponctuelles explosent dans des feux d’artifice d’hémoglobine.

Comme son prédécesseur, ce Sin City: A Dame to Kill For, outrancier au possible, a évidemment ses limites. Et ne peut prétendre à autre chose que ce statut bien dans l’air du temps, rétro et référencé, d’objet quasiment fétichiste, de pur plaisir de genre à la croisée des médiums: un film néo-noir bourré de gimmicks de comic books, stylé et sexy comme le visage couvert de cicatrices d’une strip-teaseuse avec un flingue.

NICOLAS CLÉMENT

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Partner Content