Paterson

De Jim Jarmusch. Avec Adam Driver, Golshifteh Farahani, Masatoshi Nagase. 1h55. Dist : Twin Pics.

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Jim Jarmusch envoie, à intervalles irréguliers, des nouvelles d’un ailleurs singulier mais familier en même temps, où le temps serait comme suspendu. Ainsi, l’an dernier de Paterson, merveille de haïku cinématographique comme seul le réalisateur new-yorkais semble pouvoir les imaginer… Paterson, c’est donc le nom d’une bourgade du New Jersey quelque peu décrépite ayant donné son titre à un recueil du poète William Carlos Williams. C’est aussi le patronyme du personnage central de l’histoire (Adam Driver), qui y vit avec sa compagne Laura (Golshifteh Farahani) et leur dogue anglais, Marvin. Un individu tranquille, consignant dans un carnet secret ses poèmes dont il puise l’inspiration dans l’observation d’un quotidien réglé comme du papier à musique. Et commençant immuablement par le baiser amoureux qu’il porte à Laura sur le coup de 6h15, avant de s’en aller prendre son service au dépôt de bus de la ville pendant qu’elle décorera leur maison de noir et blanc (à moins qu’elle n’applique la bichromie aux cupcakes de sa composition), le couple partageant ensuite quelque fantaisie culinaire, prélude à la promenade vespérale de Paterson et Marvin, avec arrêt imposé au Shades Bar. Paterson exalte, tout en décalage nourri d’humour sensible, ce quotidien dont il explore les infimes mais infinies variations sept jours durant, comme autant de strophes d’un film-poème. Soit du cinéma en lévitation, modeste en apparence mais touchant à quelque harmonie céleste, porté par la mise en scène lumineuse de Jim Jarmusch, la nonchalance d’Adam Driver et les mots de Ron Padgett. Et l’antidote idéal à la frénésie de l’époque, chef-d’oeuvre dans lequel on s’égare avec un bonheur chaque fois renouvelé.

J.F.PL.

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