Le samedi 28 février, Buraka Som Sistema inaugurera Nightshop. Un cycle de soirées électro world organisé par le Recyclart.

Si dans un passé encore récent, on allait au nightshop pour acheter des bières, des cigarettes ou une pizza surgelée, le Recyclart s’apprête à changer la donne. Le Recyclart va nous y faire danser. Nightshop, c’est le nom qu’il a donné à sa série de concerts axés autour de la nouvelle vague électro tropicale. La fusion des musiques du monde et de la musique de club occidentale. Pour ouvrir le feu, les programmateurs de la salle bruxelloise ont attiré dans leurs filets Buraka Som Sistema (photo). Une bande de joyeux drilles portugais qui aiment le clash des cultures, la chaleur moite des clubs et les spectateurs qui transpirent.

Pour résumer, Buraka Som Sistema mélange le rap, le grime et surtout le kuduro. Musique moderne d’origine africaine, le kuduro fait son apparition en 1996 quand le producteur angolais Tony Amado plaque des rythmes traditionnels sur le tube dance/house I Like to move it. Le titre, festif, hybride, fait naître un nouveau type de déhanchements dans les rues et dancings de Luanda. Une danse inspirée par la scène du film Kickboxer où Jean-Claude Van Damme se trémousse, bourré, en serrant les fesses. Le kuduro est né.

Kuduro, en français, ça veut dire « cul dur ». « En gros, ce sont les kids angolais qui essaient de faire de la techno mais qui ne peuvent pas échapper à leurs racines et sonner comme des Berlinois, amorce le groupe d’une seule voix. Après avoir voyagé en Europe, des DJ africains sont rentrés au pays avec des disques électro. Ils ont essayé de créer une musique qui sonne comme de la techno, voire de la house, mais ils y ont ajouté les couleurs locales. »

Danse, puis genre musical à part entière, le Kuduro est petit à petit devenu un mouvement. Un style de vie. « Comme le hip hop aux Etats-Unis, précise MC Kalaf qui a grandi en Angola dans les années 80 en écoutant Fela Kuti, mais aussi beaucoup de Kool and the Gang et de Michael Jackson. Le kuduro se caractérise par une façon de s’habiller, de se coiffer, de se comporter… Même de s’exprimer. Les jeunes utilisent un argot, un patois qu’ils ont eux-mêmes créé. Un nouveau vocabulaire est né avec le kuduro et il s’est étendu grâce à la musique. »

God is a DJ

Imaginer toute l’Afrique coupée du monde et dépourvue d’outils nécessaires à la confection de musique électronique est en complet décalage avec la réalité. Chaque membre du groupe y va de son grain de sel. « Les ordinateurs et Internet ont élargi le champ des possibles. Que ce soit en Amérique du sud ou en Afrique. Ils sont apparus dans les années 90. Comme partout. Mais pas de manière aussi rapide et généralisée. J’imagine qu’il y a quinze ans dans les grandes villes et métropoles africaines, 10 % des gens y avaient accès. Ils sont 60 à 70 % aujourd’hui. A côté de ça, les Angolais voyagent. Ils vont étudier à l’étranger. Puis rentrent à la maison. » Comme la communauté angolaise est très importante au Portugal, le « cul dur » est venu se dandiner aux portes de l’Europe. Avant de se lancer dans le kuduro, Rui Pite (DJ Riot) et Joao Barbosa (Lil’ John) faisaient du rock. Fortement influencé par les années 90. « Rien d’ethnique ni d’électronique, se souviennent-ils. Puis nous avons commencé à écouter Prodigy et de la drum’n’bass… Nous n’avons jamais avancé avec des £illères. »

En attendant, c’est la culture dominante qui mène la danse… Les groupes portugais ont eux aussi du mal à s’exporter. « Comme il est compliqué, j’imagine, pour les Belges de vendre à l’étranger, relativise MC Kalaf. C’est une question de circuit. Ce qui sort de chez nous et fonctionne à l’international relève la plupart du temps du fado. Pas de la dance music ou de l’électro. » »Ce sont les DJ avant tout qui nous ont permis de répandre notre musique. Des mecs qui ont entendu nos chansons et qui ont eu envie de les jouer sur les dancefloors, enchaîne Rui Pite. Quand on a créé notre MySpace, plein de gens se sont manifestés. Curieux. Car lorsqu’un type comme Switch ou Diplo se met à passer votre morceau, vous en avez cinq ou six autres qui lui emboîtent le pas. »

Les membres de Buraka Som Sistema désirent éveiller une certaine conscience sur le reste du monde. Montrer que les rythmes les plus forts sont souvent cachés dans les coins les plus reculés. Un peu comme y est parvenue M.I.A., invitée sur Black Diamond, leur premier véritable album studio depuis peu dans les bacs. Quand Buraka fait résonner les Wegue Wegue, même si ça ne veut rien dire, on a foutrement envie de danser.

 » En 2008, les groupes alternatifs occidentaux ont puisé pas mal de leurs sonorités dans la musique africaine, cons-tate Joao Barbosa . En 2009, ce sera probablement au tour de la pop mainstream. » Les trois autres rebondissent.  » Les gens en ont marre d’entendre des chansons construites sur le même mode. De la même façon. Les artistes essaient donc de trouver quelque chose de frais à présenter. En même temps, pour les musiciens, qui utilisent souvent les mêmes accords, il s’agit d’un challenge que de se familiariser à d’autres sonorités. Tout le monde est en quête de nouvelles formules. »

Rien de fondamentalement neuf selon les quatre zigotos. « Paul Simon s’intéressait déjà à la musique africaine il y a 25 ans et d’ici quelques années, vous verrez qu’on aura un nouveau Seven Seconds… » l

www.myspace.com/burakasomsistema

Black Diamond ( ), chez Enchufada.

En concert au Recyclart le 28/2.

Texte Julien Broquet

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