Musique et BD, loin du classique

Petit Livre Black Music

SI LE ROCK FUT NATURELLEMENT LA PREMIÈRE DES MUSIQUES À FUSIONNER AVEC LA BANDE DESSINÉE, LES AUTRES MOUVEMENTS COMME LA HOUSE, LE RAP OU LA TECHNO Y TROUVENT DÉSORMAIS AUSSI LEUR PLACE.

Une simple question de générations. Lorsque la bande dessinée s’est ouverte au monde des lecteurs adultes et aux récits ni fictionnels, ni enfantins, ses auteurs étaient eux-mêmes des enfants du rock. Deux sous-cultures qui ont suivi un développement parallèle -le magazine Métal Hurlant avait bien choisi son nom- et ont connu avec les années des mélanges de plus en plus prégnants. On a ainsi pu voir Blexbolex causer de Jerry Lee Lewis ou Luz s’éclater sur du Funkadelic dans la collection Rock Strips, pendant que Manuel Decker collectait, en 2009, et dans un beau livre au format 33 tours, près de 200 pochettes de vinyles illustrées par les plus grands auteurs francophones, de Moebius à Sempé en passant par Loustal, Druillet ou Tardi -une mode depuis longtemps en vogue aux États-Unis, ou les liens entre BD underground et sous-culture musicale ont toujours été étroits: on se souvient encore des dessins de Charles Burns sur les disques d’Iggy Pop. Mais cette culture essentiellement rock semble faire de plus en plus de place, en BD et avec les années, à d’autres genres musicaux, et à d’autres formats: les auteurs, désormais, déclarent leur flamme tant à l’électro qu’au hip hop.

On a déjà évoqué ici la sortie en français du culte Hip Hop Family Tree, la série créée par l’Américain Ed Piskor, d’abord sur le site Boing Boing il y a quatre ans, ensuite chez Fantagraphics, et désormais chez l’éditeur Papa Guédé en français dans le flow: une approche journalistique, historique et quasiment généalogique du hip hop, comme son nom l’indique, qui démarre dans le Bronx dans les années 70, et qui devrait se poursuivre jusqu’à aujourd’hui -le premier tome qui vient de sortir s’arrête en 1981, mais deux autres sont déjà sortis aux États-Unis.

Le Français Hervé Bourhis a lui aussi pris le pli de l’approche chronologique dans ses fameux Petit Livre. S’il a consacré, logiquement on l’a dit, ses premiers volumes aux Beatles et au rock, il vient de sortir, accompagné de l’excellent Brüno, un Petit Livre Black Music de toute beauté, et consacré cette fois aux musiques afro-américaines, rap et house compris. Chaque fois, le mécanisme est le même (on le retrouve également dans le volume de la Petite Bédéthèque des Savoirs qu’il a consacré au heavy metal en mars dernier, avec Jacques de Pierpont): pour chaque page ou double page, une année, un album-phare et un maximum d’informations, petites ou grandes, évidemment illustrées. Le rockeur se révèle ici un redoutable connaisseur et dresse presque inconsciemment le récit d’une émancipation qui dépasse de loin le seul cadre musical.

Enfin, on remarquera que cette approche historico-chronologique n’est plus la seule à trouver à s’exprimer en BD. Récemment toujours, on est tombé sous le charme du Daho, l’homme qui chante, de Alfred et Chauvel, qui raconte au plus près le processus de création de son dernier album. Alfred poursuivant cette aventure entre son et dessin en mettant en images des textes de Brigitte Fontaine dans Boulevard des SMS. Quant à la house et la techno, au coeur du Chant de la machine, on signalera aux fans le Rêves syncopés qui proposait l’année dernière un voyage sensitif et un peu épileptique dans les soirées de Laurent Garnier.

O.V.V.

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