Tronches de vie – À travers deux figures hors normes, Jacques Mesrine et Michel Colucci, plongée dans la France de la seconde moitié du XXe siècle. Si proche, si loin…

De Jean-François Richet. Avec Vincent Cassel, Cécile de France, Gérard Depardieu. 1 h 49. Dist: A-Film. (1)

De Antoine de Caunes. Avec François-Xavier Demaison, Léa Drucker, Olivier Gourmet. 1 h 38. Dist: Mélimedias. (2)

Mesrine et Coluche, voilà bien deux sujets incontournables pour un cinéma français gagné à son tour par la fièvre du biopic. Bien qu’essentiellement différents, l’un et l’autre se rejoignent en effet dans leur destin d’icônes, doublées d’empêcheurs de tourner en rond de la cinquième République. Là s’arrête toutefois la comparaison, entre un Mesrine ayant emprunté le chemin de la criminalité pour s’imposer Ennemi public n°1, et un Coluche qui choisira la voie de l’humour, avant de se lancer, pour un temps, dans l’arène politique. Et de rebondir, quelques années plus tard, avec les Restos du coeur.

Si elles tiennent l’une et l’autre peu ou prou de l’hommage, les biographies que leur consacrent respectivement Jean-François Richet et Antoine de Caunes varient cependant largement dans leur approche. Mesrine dans l’objectif de Richet, c’est en effet une sorte de cow-boy des temps modernes, dont L’instinct de mort – il s’agit de la première partie d’un diptyque – s’emploie, pour l’essentiel, à retracer les « hauts » faits, pas toujours reluisants d’ailleurs. Soit une geste qui conduit Jacques Mesrine de l’Algérie (épisode fondateur qu’escamote pratiquement le réalisateur, de même d’ailleurs que celui de l’OAS) au Canada, et bientôt de simples cambriolages en grand banditisme, au gré d’une équipée que Richet nous décrit violente, certes, mais non dénuée d’un certain panache.

Si l’efficacité de l’entreprise est incontestable, l’absence de point de vue vaut complaisance, et suscite un malaise certain que ne dissipent pas les maigres compléments, encore que Vincent Cassel, Mesrine mimétique à l’écran, précise: « Il n’y a pas de héros dans la criminalité. »

Le parti d’en rire

De point de vue, Antoine de Caunes en adopte pour sa part un séduisant. Il aborde la personnalité de Coluche à l’automne 1980, moment où l’humoriste préféré des Français se lance dans la campagne présidentielle, pour refermer le chapitre huit mois plus tard, sur l’élection de François Mitterrand. C’est là, assurément, une période charnière de l’histoire récente de la France, tant elle porte en elle les germes d’un changement. Entré en campagne pour faire rire, Coluche fédérera bientôt les espoirs d’une frange significative de la population – montée en puissance qui le dépassera toutefois.

De cette époque, L’histoire d’un mec propose la reconstitution soignée, non sans livrer un portrait contrasté de l’homme, que de Caunes n’hésite pas à montrer empêtré dans ses contradictions profondes. C’est là l’intérêt majeur d’un film, porté également par l’exceptionnelle incarnation de François-Xavier Demaison, mais quelque peu desservi par la confusion et le rythme trop lâche de la mise en scène. En complément, un making of classique, mais aussi des scènes coupées, parmi lesquelles une ouverture alternative qui voyait, au soir du 10 mai 1981, Coluche en venir aux mains avec des supporters déçus, emmenés, pour les besoins de l’écran, par… Bernie Bonvoisin. Antisocial? Les Restos du c£ur allaient venir corriger ce sentiment…

Jean-François Pluijgers

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