Marco Ferreri – Le cinéma ne sert à rien

La postérité tapageuse que lui a valu La Grande Bouffe, pamphlet définitif contre la société de consommation et scandale retentissant en 1973 à Cannes et au-delà, a quelque peu occulté le cinéma de Marco Ferreri, l’un des réalisateurs majeurs de son époque, critique féroce et non dénué d’humour (noir) du monde contemporain. C’est dire si l’essai que lui consacre aujourd’hui Gabriela Trujillo arrive à point nommé pour éclairer une oeuvre généralement mal connue. Le parcours de l’auteur de Dillinger est mort et autre Rêve de singe, l’historienne du cinéma l’aborde chronologiquement avant de procéder par coupes transversales dans sa filmographie. Et d’envisager son cinéma désespéré sous l’angle de l’aliénation et de ses modalités, ou encore du couple  » comme hypothèse et comme aporie« , quand elle ne questionne pas Ferreri et le féminisme – » Au long des films, on devine surtout la haine du réalisateur pour le rôle historique que la société attribue à la femme« -, avant d’ausculter la  » crise de la masculinité » à l’oeuvre dans son cinéma. Soit un ouvrage fouillé, s’attardant encore sur ses collaborations privilégiées -le scénariste Rafael Azcona, ou Ugo Tognazzi, l’un de ses acteurs fétiches, au même titre que Piccoli et Mastroianni- ou quelques-unes de ses figures-clés, histoire de se convaincre avec l’autrice que  » s’il est une urgence à notre époque, c’est bien celle de (re)découvrir la portée critique et politique, existentielle et révolutionnaire des films de Marco Ferreri. Et, à travers eux, le cri de défaite de l’homme moderne, le bouleversement des liens entre les sexes au cours d’un XXe siècle hanté par l’absurde et la peur de l’anéantissement ».

De Gabriela Trujillo, éditions Capricci, 168 pages.

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