COMMISSAIRE DE L’EXPOSITION

En 98, Marc Benaïche fondait Mondomix, site Web « sur les musiques et les cultures dans le monde« , l’un des premiers du genre (décliné aujourd’hui en version papier). C’est également lui qui est à la base de l’exposition Great Black Music, parcours interactif touffu, constitué essentiellement de documents audio-visuels -plus de onze heures en tout! « Il y a un parcours linéaire, mais à l’intérieur de ce parcours, chacun peut se créer sa propre visite« , explique le commissaire de l’événement.

Avant d’arriver à Paris, l’expo est passée par Dakar, puis la Réunion et Johannesburg. Mais sous une autre appellation…

A Dakar, on parlait en effet des Musiques noires dans le monde. A Paris, on a préféré titrer Great Black Music, parce qu’en la présentant en Europe, se pose d’emblée la question complexe de la position raciale. Et si on se place dans une démarche raciale, alors on n’est pas très loin de quelque chose qui tend vers le racisme… L’avantage d’un terme comme celui de Great Black Music est qu’il a été proposé par les musiciens afro-américains eux-mêmes, à Chicago, dans les années 60. Quand on parle de musiques noires, il s’agit donc d’abord d’une histoire construite par les musiciens eux-mêmes!

Comment cerner votre objet?

De manière très simple. Le point de départ, c’est l’amour de la musique. Le travail réalisé pour cette expo ressemble en fait à celui que vous faites pour une compilation, ou au boulot d’un programmateur radio. On s’est lâchés et on est partis sur quelque 1000 morceaux. A partir de là, on a commencé à tisser les histoires, qui sont celles de ceux qui les ont créés. Une histoire parmi d’autres évidemment.

On est également parti d’une aire géographique, que Paul Gilroy qualifie d’Atlantique noir. Soit les deux rives africaines et américaines, ainsi que caribéennes. A l’intérieur de cette aire, nous avons raconté une histoire qui se déroule dans la grande Histoire, celle de l’esclavage, de la déportation de millions d’Africains sur les côtes américaines, puis l’Histoire de la colonisation, de la décolonisation et aujourd’hui de la mondialisation. On remonte par exemple jusqu’à -2500 av. J-C, et l’Egypte ancienne. Quand l’historien sénégalais Cheikh Anta Diop confirme que les pharaons étaient Noirs, c’est un point extrêmement important pour les communautés africaines dans le monde.

Une première salle présente une vingtaine de « légendes des musiques noires ». Parmi elles, Elvis Presley…

Oui, c’est le seul qui a la peau blanche. En quelque sorte, c’est peut-être le dernier « minstrel » blanc, le dernier black face (référence aux spectacles populaires vaudevillesques proposés par des Blancs maquillés en Noirs, au début du XXe siècle, aux Etats-Unis, ndlr). C’est lui qui mime la danse, les gestes et le chant des Noirs. Mais il le fait tellement bien qu’il deviendra l’une des icônes du rock.

L.H.

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