Les Abeilles d’hiver

L’Eifel, automne 1943. À deux pas de la frontière belge, Egidius Arimond s’occupe de ses ruches, héritées de son père, et qu’il prépare pour l’hiver. Épileptique qui a miraculeusement échappé au programme eugéniste Aktion T4 des nazis, cet apiculteur chevronné, ancien professeur de latin et d’Histoire révoqué, continue à vivre seul, tandis que son frère vole sur des insectes de métal de plus en plus gros, et que, pour sa part, il butine les reines locales qui ne se croient ni s’espèrent déjà veuves. Les jours et mois passant, la petite ruche qu’est la cité locale et ses alentours voit bourdonner dans le ciel des essaims d’avions ennemis qui ne font que grandir, se rapprocher, de plus en plus menaçants. Roman sous forme de journal de la vie d’un individu, d’une communauté -chaque journée se résume à deux pages comme s’il s’agissait d’une alvéole d’un cadre rucher représentant une saison-, l’écriture en est sans apprêt, descriptive, presque entomologique, même si c’est le « héros » qui parle. Lequel préfère s’immerger dans l’émerveillement de l’infiniment petit pour échapper au tragique de la grande catastrophe. Sauf que, sous le camouflage d’un style des journaux de guerre à la Ernst Jünger dans son final, cet Untermensch, surprenant jusque dans la postface, fera son miel en sauvant des vies au péril de la sienne.

De Norbert Scheuer, éditions Actes Sud, traduit de l’allemand par Marie-Claude Auger, 368 pages.

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