Le Coeur en bandoulière

Michel Tremblay aurait donc pris un coup de vieux, comme on abuse du soleil de Key West. L’immense dramaturge québécois ( Les Belles-soeurs) réside la moitié de l’année dans cette station balnéaire floridienne et adore observer les crépuscules plongeants sur le golfe du Mexique. Chapitré par cinq de ces couchers de soleil, ce court roman « hybride » nous livre son angoisse de l’âge qui avance et de la pertinence de l’artiste une fois les belles années passées. L’auteur ressort d’un tiroir les brouillons d’une pièce qu’il n’a jamais terminée et pense y trouver l’exutoire à sa quête, car étrangement, entre les protagonistes du texte se jouent les mêmes déchirements qui traversent Tremblay, le narrateur. Une famille de comédiens, réunie pour le repas de l’Action de grâce (Thanksgiving au Québec), se déchire sur la nouvelle génération théâtrale et le rôle de la critique. Davantage que régler ses comptes, Michel Tremblay annote cet enfant inachevé de ses commentaires critiques, lui écrit une fin et traduit l’exercice de style en une réflexion un peu mélancolique sur comment ne pas être dépassé aujourd’hui. Le Coeur en bandoulière pointe vers le livre à thèse, destiné à un public restreint, mais se rattrape par la subtilité et la sincérité de cette confession à la fois inquiète et apaisée, somme toute universelle.

De Michel Tremblay, éditions Actes Sud/Léméac, 128 pages.

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