AVEC THE HOMESMAN, TOMMY LEE JONES SIGNE UN WESTERN AU FÉMININ, VOYAGE EXISTENTIEL DANS DES HORIZONS FANTÔMATIQUES QU’HABITE, TOUT EN INTENSITÉ, HILARY SWANK.

The Homesman

DE ET AVEC TOMMY LEE JONES. AVEC HILARY SWANK, MIRANDA OTTO, JOHN LITHGOW. 2 H 02. DIST: BELGA.

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« J’avais en tête un film minimaliste. Il n’y a pas beaucoup de détails visuels dans les plaines et les prairies du Nebraska, ou dans la partie nord de la région Ouest. Cela constitue la base de l’organisation visuelle. Le terme « minimaliste » est choisi à cause du paysage qui consiste essentiellement en une longue ligne séparant le ciel et la terre. Cela crée un environnement propice aux émotions, qui s’ajoute au contexte naturel. » Neuf ans après The Three Burials of Melquiades Estrada, The Homesman, le deuxième long métrage de Tommy Lee Jones en tant que réalisateur, vient confirmer son attachement à l’un des genres fondateurs du cinéma américain, le western (encore qu’il n’accepte l’appellation que du bout des lèvres), tout en soulignant la singularité de son regard. Car si le film est classique dans sa texture, il est tout sauf conventionnel dans son propos, décliné essentiellement au féminin. Et s’inscrivant à rebours du schéma narratif traditionnel de la conquête de l’Ouest, ses protagonistes empruntant, comme dans son premier opus d’ailleurs, la route du retour -des plaines du Nebraska aux terres plus hospitalières de l’Iowa, en l’occurrence.

L’histoire débute dans une petite communauté du Nebraska dans les années 1850, aux premiers temps de la colonisation. C’est là que l’on découvre Mary Bee Cuddy (Hilary Swank), pionnière indépendante menant une existence austère et solitaire, vouée pour l’essentiel au travail de la terre. Une routine ingrate à laquelle elle se voit arrachée lorsque le sort la désigne pour convoyer vers l’Est trois femmes à qui la dureté des conditions de vie a fait perdre la raison. Et de partir à l’assaut des vastes étendues de la Frontière, périple hasardeux dans lequel elle va s’assurer l’assistance de George Briggs (Tommy Lee Jones), déserteur doublé d’une fripouille qu’elle a arraché à une mort certaine.

A leur suite, TLJ signe un western existentiel s’écartant résolument des sentiers battus, tant par sa dimension féministe -on pense au Meek’s Cutoff de Kelly Reichardt- que par les paysages humains, complexes et tourmentés, qu’il s’emploie à déflorer. La matière est dense, elle est incarnée avec force et intensité par Hilary Swank à qui Tommy Lee Jones offre un contrepoint robuste et laconique. Elle trouve aussi un écho sensible dans l’horizon, spectral et écrasant, que magnifie encore la photographie, superbe, de Rodrigo Prieto. L’Amérique s’y dévoile comme rarement, le film adoptant aussi les contours d’une plongée dans l’inconnu -sentiment que le producteur Luc Besson traduira par une formule choisie lors de la conférence de presse cannoise, reprise parmi les divers compléments: « Pour moi, c’était comme un film de Kurosawa.  »

JEAN-FRANÇOIS PLUIJGERS

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