Créature mythique du 7e art, la Momie connut plusieurs sommets avant de renaître pour une saga contemporaine au grand succès populaire.

Ce sera l’un des « blockbusters » potentiels les plus attendus de l’été. Mercredi 13 août, La Momie: La Tombe de l’Empereur Dragon déboulera sur les écrans chargé de grosses ambitions commerciales. Après les 416 millions de dollars de recettes réalisées par La Momie et les 433 millions totalisés par Le Retour de la Momie, la compagnie Universal attend une performance de choix du troisième épisode de sa série à succès. Une nouvelle aventure qui nous emmène en Asie, des catacombes de la Chine aux sommets de l’Himalaya. Un souverain des temps anciens, victime avec son armée d’un sortilège funeste, s’y réveillera (et ses 5000 soldats de terre cuite avec lui) pour venir mettre à rude épreuve les nerfs et le savoir de Rick O’Donnell, toujours interprété par Brendan Fraser. C’est la star du film d’arts martiaux Jet Li qui prête ses traits à l’empereur Han, alias l’Empereur Dragon.

BORIS KARLOFF, CAUCHEMAR DES ANNéES 30

Studio producteur de la série actuelle, Universal est aussi le « home » de la créature, le creuset originel d’où est sorti ce personnage à la fois horrifiant et tragique, terrible et néanmoins émouvant. Au début des années 30, la société créée par Carl Laemmle avait choisi de jouer la carte du cinéma fantastique et d’épouvante. Frankenstein, Dracula, le Loup-Garou et l’Homme invisible furent les personnages principaux d’une inquiétante mais rapidement populaire « compagnie » de créateurs déments et de monstres vengeurs. La Momie fit partie du groupe, en devenant dès 1932 la vedette d’un film réalisé par Karl Freund, un ex-directeur de la photographie émigré – tout comme Laemmle – d’une Allemagne bientôt livrée aux nazis.

On a beaucoup écrit sur la vague horrifique de l’époque, en en faisant parfois le reflet cauchemardesque des peurs venues de la grande crise économique aux Etats-Unis, et de la montée en Europe des périls politiques qui devaient déboucher sur la seconde guerre mondiale.

La Momie, première version, est une £uvre visuellement admirable, et un spectacle jouant de la terreur mais aussi d’un bouleversant romantisme. Son personnage central est un grand prêtre égyptien, Im-ho-tep, qui a eu le tort de s’éprendre d’une princesse, et de vouloir ressusciter son corps, commettant un sacrilège qu’une autorité cruelle punit en le faisant embaumer vivant! Dans le beau scénario de John Balderston, une expédition archéologique trouve la momie d’Im-hop-tep, la lecture imprudente d’un texte accompagnant le cadavre redonnant vie à ce dernier… Ainsi commence une histoire terrifiante mais aussi et surtout tragique, où le « monstre » déjà marqué par la souffrance atroce de son antique supplice va mener une quête désespérée pour faire renaître encore une fois son éternel amour.

Dans le rôle du prêtre maudit, Boris Karloff signe une de ses meilleures performances à l’écran. Celui qui avait connu la gloire, un an plus tôt, en interprétant la créature du Frankenstein de James Whale, engendre bien des frissons mais aussi une émotion profonde, dans un film au noir et blanc superbe, qui marqua son époque.

ETERNEL RETOUR

Si elle ne connut pas de suite directe, La Momie de 1932 engendra dans les années 40 une série de films où s’illustrèrent, dans le rôle titulaire, les acteurs Tom Tyler ( La Main de la momie – 1940) et surtout Lon Chaney Jr. Le fils de Lon Chaney – « l’homme aux mille visages » – fut une momie crédible dans La Tombe de la momie (1942), Le Fantôme de la momie (1944), et La Malédiction de la momie (1945). Ensuite vinrent les inévitables parodies burlesques, comme Deux nigauds et la momie (1955) où les comiques alors très populaires Abbott et Costello poursuivaient des aventures qui les avaient déjà mis en présence d’autres « méchants » comme Frankenstein, l’homme invisible ou Mister Hyde.

Eminemment plus sérieuse, et même assez marquante, fut la prise de rôle inattendue de Christopher Lee. A la fin des années 1950, le comédien britannique venait de s’imposer dans l’emploi qui devait assurer sa renommée mondiale: Dracula ( Le Cauchemar de Dracula – 1958). Mais avant de lui faire jouer plusieurs fois encore le célèbre vampire, le réalisateur Terence Fisher, pilier de la compagnie anglaise spécialisée dans l’horreur Hammer Films, lui fit incarner Kharis dans La Malédiction des pharaons (1959). Inspiré d’évidence de ce bon vieux Im-ho-tep, le personnage n’avait certes pas la douloureuse grandeur conférée à l’original par Boris Karloff. Mais un traitement visuel (des couleurs, notamment) on ne peut plus réussi, et la prestance de Lee, font du film un spectacle mémorable. Le dernier avatar vraiment notable de la momie au grand écran avant la récente série à gros budget. On relèvera pourtant encore les prestations, sous les bandelettes fatales, de Dickie Owen ( Les Maléfices de la momie – 1964), d’Eddie Powell ( Dans les griffes de la momie – 1967) et Paul Naschy ( La Vengeance de la momie – 1973). Quelques ultimes et valeureuses réincarnations jouant la corde d’une franche et baroque terreur bien oubliée dans l’actuelle saga, où le monstre cède la place centrale au pseudo-Indiana Jones de service…

TEXTE LOUIS DANVERS

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Partner Content