Philippe Cornet
Philippe Cornet Journaliste musique

APRÈS DEUX ALBUMS DE POP MÉLANCOLIQUE, LA GRECQUE MONIKA CHRISTODOULOU FILE À NEW YORK ATTRAPER UN PEU DE LA GRÂCE FUNKY AMÉRICAINE. POUR UNE SYMBIOSE PERSO.

Monika

« Secret In The Dark »

DISTRIBUÉ PAR PIAS.

8

Tout le monde n’a pas plusieurs vies: Monika, visiblement oui. Cette Athénienne de 30 ans est devenue une star à domicile, collectionnant le platine grec via deux albums sortis en 2008 et 2010. On y entend un maximum de chansons gracieuses, préférant les mélodies câlines à tout autre tempo soutenu. En anglais, ces morceaux fluides d’européanica nouent davantage de liens oniriques avec une pop-gestalt internationale qu’avec les racines helléniques, même si, à l’occasion, un Yes I Do fait le plein de bouzoukis. En 2013, après avoir failli périr en mer, Monika propose un EP de six compositions aux humeurs plus rythmiques, Make Me Fly, par exemple, accordant de l’importance aux hanches, sans tout à fait éliminer le bourdon crépusculaire (Forever Yours). Ce mini-disque là sert de chausse-pied au nouvel album, celui du déménagement musical à New York, au Dunham Sounds à Brooklyn en 2012. Ce studio analogique a tapé dans l’oreille de la chanteuse via les disques de Sharon Jones & The Dap-Kings: Monika y rencontre d’ailleurs deux des complices de Sharon, gestionnaires de l’endroit, Homer Steinweiss et Thomas Brenneck, et décide de leur confier son flow européen.

Miel soul futuriste

Le résultat est rafraîchissant: bien qu’imbibées de rhythm’n’blues et de frottements funky, les chansons ne donnent aucune impression de copier-coller ou d’artificielle mutation transatlantique. Il s’agirait plutôt d’une imprégnation d’ADN qui agit en profondeur, sans détruire la matière première, le fameux spleen méditerranéen de départ. Le mix de l’un et de l’autre donne parfois la sensation d’écouter les Talking Heads ou Blondie en mode dance (Shake Your Hands),voire d’explorer un samedi soir fiévreux en compagnie des Bee Gees (Secret In The Dark). Mais Monika garde ce même truc inné d’accrocher pareillement dans l’up-tempo que dans le folk-pop romanesque. Entourée de musiciens new-yorkais, elle en préserve l’environnement chaud, la balise dansante, la nature organique, sonorités des bandes et d’amplis à lampes qui mènent parfois aux cuivres en gargouille: le tout, détaché de la charpie revival. Si parfums discos ou trémoussements seventies il y a, Monika les emmène ailleurs, travaillant à leur métamorphose. Marquée sur Take Me With You, où un beat lent, pas loin d’être fantomatique, se couvre d’une voix d’opéra, comme une sorte de miel soul futuriste libéré de toute entrave. Une transformation musicale efficace et charmante, qui semble promettre d’autres bonnes choses.

PHILIPPE CORNET

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