Louis Danvers
Louis Danvers Journaliste cinéma

20.35 FRANCE 2

DRAME D’ ABDELLATIF KECHICHE. AVEC HABIB BOUFARES, HAFSIA HERZI, FARIDA BENKHETACHE. 2007.

Abdellatif Kechiche est sans aucun doute l’un des cinéastes français les plus intéressants à s’être révélés en ces débuts de XXe siècle. Le natif de Tunis, âgé aujourd’hui de 50 ans, fut comédien (pour André Téchiné, notamment) et metteur en scène de théâtre, avant de passer derrière la caméra en 2000 avec La Faute à Voltaire. C’est L’Esquive, sorti 4 ans plus tard, qui lui offrit une première grande reconnaissance sous la forme de 4 Césars, dont celui du Meilleur Film. Avant d’entreprendre le controversé mais remarquable Vénus noire, Kechiche réalisa ce qui est peut-être son meilleur film à ce jour: La Graine et le mulet. A son tour récompensé par 4 Césars, et un Prix du Jury au festival de Venise, cette £uvre à la fois très abordable et très particulière nous emmène dans la ville de Sète, si chère à Georges Brassens. C’est là que vit Monsieur Beiji, un sexagénaire certes fatigué par des années de travail pénible sur le port, mais encore dynamique et attaché à maintenir ses liens avec une famille que son divorce a marquée. Aux prises avec des difficultés financières, ayant de plus en plus le sentiment d’être devenu inutile, il va reporter ses espoirs sur la concrétisation d’un rêve: ouvrir son propre restaurant sur un bateau amarré aux quais du vieux port. Il n’a pas, loin de là, l’argent nécessaire, mais il va multiplier les démarches, et recevoir l’aide de proches tous mobilisés autour de son projet. Le film nous fait accompagner Monsieur Beiji (Habib Boufares, magnifique) du songe à la réalité, jusqu’au grand jour de l’ouverture du restaurant, qui ne sera pas forcément celui du triomphe du héros…

Tendre et acide

Kechiche filme juste et en profondeur, avec une vérité humaine d’autant plus intense qu’il préfère à l’action pure une peinture attentive du quotidien. Jamais sollicitée, l’émotion est d’autant plus grande, et certaines scènes sont poignantes à l’extrême. La plongée dans le monde des Français d’origine immigrée est subtile, tendre souvent et parfois très acide, notamment quand le réalisateur a le cran de montrer que les torts ne sont pas tous le fait des autres, mais sont parfois à trouver au sein même de la communauté. Dans un rôle tout sauf secondaire, la jeune Hafsia Herzi est une superbe révélation. l

LOUIS DANVERS

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