DE CHRIS HEDGES ET JOE SACCO, ÉDITIONS FUTUROPOLIS, 322 PAGES.

Quand vous lirez ces lignes (merci), les élections américaines auront enfin rendu leur verdict, et l’on sera tous enfin débarrassés de l’omniprésence médiatique de nos amis, à la hauteur certes de l’événement mais aussi de ce qui reste un modèle de pensée, en matière de puissance économique, de politique capitaliste ou d’empire culturel. Et pourtant, malgré l’overdose, il reste un livre à lire pour en finir quatre ans durant au moins sur le sujet -les Etats-Unis- et s’offrir un saisissant contraste avec les paillettes du vainqueur, quel qu’il soit. Les amateurs d’Histoire, de journalisme, d’Amérique et aussi, mais pas seulement, de bande dessinée, doivent se ruer sur ce pavé, pour ne pas dire brûlot: Jours de destruction, jours de révolte brosse comme son nom l’indique et en 300 pages mêlant BD et reportages écrits, sur le terrain, un portrait plus qu’à charge de l’Amérique contemporaine. Presque un appel au soulèvement.

Le terrain, ce sont les bas-fonds laborieux des Etats-Unis, cette masse de travailleurs, d’indigents, d’illégaux et de laissés-pour-compte sur lesquels l’Amérique, quoiqu’on en dise, prospère. C’est Pine Ridge, dans le Dakota du Sud, avec Mike et sa vie d’Améridien pauvre, criminel et junkie. C’est Camden, dans le New Jersey, dans les pas de Joe, 66 ans, ouvrier toute sa vie. C’est Welch, en Virginie, avec Rudy, nonagénaire bouffé par la silice, mineur pendant 40 ans, pauvre toute sa vie. C’est Sarasota en Floride, avec Ana, Guatémaltèque en séjour illégal, privée de sa fille et main d’£uvre des grandes entreprises agricoles, pour ne pas dire esclave. Et partout, le même constat de précarité extrême, de violence insoutenable, d’injustices scandaleuses. Les auteurs sont, comme leurs témoins, des hommes en colère, et au combat -Joe Sacco et Chris Hedges se sont fait connaître, et ça se sent, pour leurs reportages en zones de guerre, que ce soit la Palestine, la Bosnie ou l’Irak. Les Etats-Unis en sont simplement devenus une autre.  » Le capitalisme oligarchique va tous nous tuer, au sens propre du terme. Rien ne l’arrête, tant que cela permet d’engranger des bénéfices. » Les mots de Chris Hedges sont clairs, les dessins en noir et blanc de Sacco le sont tout autant: la charge sera violente.

O.V.V.

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