LE MOZART DU VICE -Trois films offrent une vision panoramique de l’ouvre de l’acteur-réalisateur Roberto Benigni, comique survolté.

Johnny Stecchino, de et avec Roberto Benigni, avec Nicoletta Braschi, Franco Volpi. 1 h 42.

Il Mostro, de et avec Roberto Benigni, avec Nicoletta Braschi, Michel Blanc. 1 h 45.

La Tigre e la neve, de et avec Roberto Benigni, avec Nicoletta Braschi, Michel Blanc. 1 h 50. Edité par Cinéart/Twin Pics.

Clown poète et malicieux pour les uns, histrion insupportable pour les autres, Roberto Benigni ne laisse personne indifférent depuis qu’on le découvrit, en 1986, dans Down by Law, de Jim Jarmusch, où il composait, avec Tom Waits et John Lurie, un aussi improbable qu’inoubliable trio. Benigni s’est ensuite multiplié sur divers fronts: comédien bien sûr (et héritier autoproclamé de Chaplin, Keaton et Sellers), mais plus encore metteur en scène de ses fantaisies. Trois d’entre elles sont ici réunies, et offrent une vision panoramique de son £uvre (même si manque La Vita e bella, son film le plus emblématique et le plus abouti).

Premier dans la chronologie, Johnny Stecchino (1991) est un film de mafia, à la sauce Benigni s’entend. On y fait la connaissance de Dante (l’auteur, naturellement), un innocent doublé d’un coureur de jupons impénitent essuyant échec sur échec. Jusqu’au jour où la belle Maria (Nicoletta Braschi) lui tombe miraculeusement dans les bras. Il y a bien entendu une explication que n’entrave nullement l’anti-héros: Dante est le double parfait de Johnny Stecchino, mafioso que Maria dissimule dans sa cave de Palerme…

La mesure ne figurant pas dans le vocabulaire de Benigni, Johnny cure-dents est un film survolté, un sketch permanent. Cela posé, c’est aussi une fantaisie drôle et savoureuse, où l’acteur ajoute à une gestuelle sous influence chaplinienne, une panoplie échevelée de gags cocasses et un sens avéré du comique répétitif.

MICKEY ET MINNIE

De cette farce burlesque, Il Mostro (1995) peut apparaître comme le double inversé. C’est en effet cette fois Nicoletta Braschi, revêtant le costume d’une femme-flic, qui sert d’appât pour débusquer Benigni, prédateur sexuel présumé, un véritable Mozart du vice pour reprendre l’expression de Michel Blanc, excellent en expert-psychiatre commis à l’enquête. Si, on l’aura deviné, tout cela n’est pas nécessairement d’une exquise finesse, le film fonctionne pourtant admirablement. Benigni démontre ici un sens aiguisé du tempo comique, multiplie gags et quiproquos, tout en composant avec Nicoletta Braschi un couple à l’alchimie manifeste.

C’est ce lien-là qui sous-tend La Tigre e la neve (Le Tigre et la neige), qu’il réalise en 2005, dix ans après Il Mostro. Entre-temps, le cinéaste italien a connu la reconnaissance internationale avec La Vita e bella (1997), un film auquel il emprunte un contexte sérieux, aux camps de concentration succédant la guerre en Irak. C’est là qu’Attilio (le cinéaste), poète porté par son amour absolu, s’en ira tenter de sauver l’élue de son c£ur, Vittoria (Nicoletta Braschi, comme il se doit). On a connu scénario mieux balancé; le film n’a par ailleurs pas cette fraîcheur et cette spontanéité souriante qui faisaient une partie du charme et de la drôlerie des précédents. Dans les interviews proposées en complément, Benigni cadre joliment sa relation avec Nicoletta Braschi, compagne à la ville comme à l’écran: « Nous sommes comme Mickey et Minnie.  » Diverses scènes coupées complètent le programme, dont une, hilarante, est réminiscente de l’ouverture du Corniaud.

u www.cineart.be

JEAN-FRANçOIS PLUIJGERS

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