L’Ancienne Belgique et le Botanique s’échangent leurs artistes le temps d’un mini-festival. Zoom sur les rapports nord-sud.

Très proches géographiquement, l’un est néerlandophone, l’autre subsidié par la Communauté française. L’Ancienne Belgique et le Botanique parlent pourtant la même langue: celle de la musique. Pour la seconde année consécutive, ils organisent ensemble, les 29 février et 1er mars, le Festival ABBota. Un événement qui mêle en une fête commune des équipes, des artistes et des publics qui se connaissent déjà. Un séjour linguistique à domicile en quelque sorte. Même si tout le monde, ou presque, chante en anglais.

 » Le déclencheur, c’est une sorte de corporatisme. Mais dans le bon sens du terme, explique Paul-Henri Wauters, le grand manitou du Botanique. Nous faisons les mêmes métiers. Nous connaissons les mêmes problèmes. Nous défendons les mêmes valeurs. Nous voulons passer au-delà de la concurrence, des frontières, de l’exclusion. Une véritable amitié nous unit. Quand nous sommes en repérage dans les festivals, nous allons voir les concerts ensemble. Même si on se bat parfois, ensuite, pour attirer chez nous un artiste (rires).  » Car tout, dans le métier, va de plus en plus vite.

UNE HISTOIRE DE CHIFFRES

Mais revenons-en à leur mini-festival. Cette année, le Bota ouvrira ses portes à Elvy et Absynthe Minded mais aussi au Bony King of Nowhere et au Millionaire Tim Vanhamel qui se la joue solo. L’AB accueillera pour sa part Coem, Ideal Husbands, The Tellers et Soy Un Caballo. Le seul de ces artistes qui s’exprime dans sa langue maternelle.

 » Les questions que nous nous posons au moment d’établir la programmation sont: qui est dans l’actu et qui peut tirer profit de ce type d’éclairage?« , résume-t-on à l’AB. Selon une enquête que l’établissement a réalisée l’an dernier, 26 % en moyenne des spectateurs de l’Ancienne Belgique sont des francophones. Avec des pics, évidemment, quand les stars d’un soir s’appellent Ghinzu et Girls in Hawaii, BB Brunes ou Aaron. Puisque l’AB accueille annuellement quelque 275 000 visiteurs, on peut estimer à 71 500 le nombre de visiteurs parlant la langue de Gainsbourg, Bashung et Cantat.

Du côté du Botanique, on estime, à la grosse louche, que c’est du 50-50. Du moins si on exclut des décomptes la chanson française.  » Il arrive même que les Néerlandophones soient majoritaires sur les concerts d’artistes anglo-saxons. Mais il est difficile de comparer les deux institutions dans ce domaine, reprend Paul-Henri Wauters. Il faudrait un prisme avec les projets Live Nation. Les grosses machines qui attirent souvent un contingent plus important de néerlandophones. A mon avis, nous adoptons la même attitude face aux Flamands que nos vis-à-vis face aux francophones. Même si nous ne misons pas sur un marketing high-tech, agressif, nous avons une communication bilingue affirmée.  »

Pourtant, c’est une question de culture. Une histoire de chiffres. Si en Europe en général, et en France en particulier, on se plait à disserter sur la scène belge, les artistes francophones et néerlandophones, à quelques exceptions près, connaissent les pires difficultés à traverser la frontière linguistique. Alors que les Girls in Hawaii ont écoulé en Belgique 80 000 exemplaires de leur premier album From Here to There, ils n’en ont vendu que 1 500 au nord du pays.  » Le deuxième prend bien, se réjouit Yves Merlabach (Bang!). Studio Brussel diffuse le single. Le concert du Trix, à Anvers, affiche complet et nous avons reçu des échos positifs du disque dans Humo , le Morgen et le Standaard . Au vu des commandes, les magasins flamands semblent y croire. « 

Beaucoup d’appelés, peu d’élus. Quel que soit le sens des flux. Le label distribue les Van Jets. Il a fourgué 5 000 disques du groupe ostendais. Et pourtant, pas de vente, pas de radio en Wallonie.

C’est pourtant Bang!, label francophone, qui sortait en 1993 le premier simple de dEUS. Le Botanique – Piet Goddaer ne cesse de le répéter -, qui a soutenu Ozark Henry à ses premières heures. Et Stu Bru qui donne actuellement un coup de pouce à Autumn, le projet de Veence Hanao. Rien n’est perdu.

Festival ABBota. Le 29/02 à l’AB: The Tellers, Coem, Ideal Husbands, Soy Un Caballo. Le 1/03 au Botanique: Absynthe Minded, Bony King of nowhere, Tim Van Hamel, Elvy. www.botanique.be www.abconcerts.be

TEXTE JULIEN BROQUET

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