Chanteuse dilettante, elle reprend les classiques que Serge Rezvani a notamment écrits pour Jeanne Moreau.

C’est décidément un drôle de personnage. Des premières apparitions d’Helena Noguerra – comme mannequin, animatrice sur M6,… -, on n’a longtemps vu que des tentatives de rejoindre la lumière dans laquelle baignait sa grande s£ur, Lio. Un peu court, mais cohérent. Aujourd’hui, une autre thèse l’emporte: celle d’un caractère versatile et libre.

Son dernier projet par exemple. Signée sur le label jazz, Helena Noguerra vient de sortir Fraise-Vanille, entièrement composé de reprises de Serge Rezvani. L’homme a tout fait dans sa vie: artiste-peintre, écrivain, et auteur de classiques de la chanson comme Le Tourbillon, J’ai la mémoire qui flanche,… « Ma mère les chantait tout le temps. Vers mes 20 ans, j’ai racheté le CD. Il fait partie de mes albums de chevet. »

C’est au cours d’une soirée de présentation du dernier livre de Rezvani qu’Helena Noguerra chante quelques titres. L’auteur est présent. Il la pousse à aller plus loin. Elle lui rappelle avoir déjà échangé une correspondance, comme elle le fait souvent avec les gens qu’elle admire. Elle raconte ainsi avoir écrit à l’âge de 12 ans à Godard, ou tenu au courant Fellini du développement de sa poitrine adolescente, lui qui aimait tant filmer les plantureuses. Plus récemment, elle a encore envoyé des missives à Madonna, Tim Burton… Parfois, elle reçoit une réponse. Celle de Rezvani, par exemple. « Il ne se souvenait pas m’avoir répondu. Mais je lui ai montré les lettres. Il était très ému. » Elle-même a été bouleversée par le testament amoureux livré par le vieux monsieur (80 ans cette année), à propos de Lula, la femme de sa vie, emportée par la maladie en 2004. « Je ne suis même pas romantique, je suis rezvanique! », dit-elle. De fait, il y a plus d’un point commun entre les deux. Certes, elle se trouve bien sage par rapport au punk Rezavni, montant seul sur scène avec sa guitare et ses deux accords: « Il est l’être le plus libre que je connaisse », dit-elle, avant même son compagnon Katerine. Les deux partagent cependant un amour de la marge. « C’est un type qui s’est mis à côté, en changeant de nom, en variant les disciplines… C’est un peu l’outsider des grands auteurs. Moi aussi, je suis souvent dans la position du challenger, on croit toujours que je débute. On peut voir ça comme une fuite, c’est vrai. Une manière de se positionner au monde, sans s’affirmer trop. »

Fraise Vanille, Helena Noguerra, Universal/Bang!

LAURENT HOEBRECHTS