FÉMINISTE, ATYPIQUE ET REBELLE AUX CLICHÉS, LA JEUNE COMÉDIENNE LOUISE BOURGOIN BRILLE DEVANT LA CAMÉRA DE NICOLE GARCIA, ET BIENTÔT D’AXELLE ROPERT.

L’actualité lui a réservé deux rôles épatants dans des films d’amour très différents l’un de l’autre. Côté drame chez Nicole Garcia dont Un beau dimanche sort ces jours-ci, et côté lumière dans Tirez la langue, Mademoiselle d’Axelle Ropert, attendu pour dans quelques semaines. Une double occasion de faire le point avec une actrice différente de ce qui semble être le « modèle français » de femme menue et frêle, façon Binoche, Huppert ou Tautou…

Comme toujours très à l’aise dans le contact humain, Louise Bourgoin apprécie qu’on puisse comparer son impact physique à celui de stars américaines de l’âge d’or hollywoodien comme Jane Russell ou Rita Hayworth. « Cela fait maintenant une bonne vingtaine d’années qu’on filme des actrices non pas vraiment « sans corps » mais petites, fragiles. C’est assez cinégénique, en fait, on voit beaucoup plus le visage, et la fragilité est chose touchante. On voit très peu d’actrices qui font 1 mètre 80 comme moi, et qui ont beaucoup d’épaule…  »

Sa taille élevée a plus d’une fois, pour ses rôles précédents, poussé les réalisateurs à « l’amenuiser« , comme elle dit en riant. « Souvent on creusait de petites tranchées, pour les travellings de marche avec un acteur, révèle l’ex-miss météo de Canal+, car il ne fallait surtout pas que je sois plus grande que mon partenaire! Alors moi je marchais dans la tranchée… Et pour les scènes de baisers, l’acteur avait une petite marche pour se hisser à mon niveau. Ils sont souvent assez petits, les acteurs… » Les yeux de Louise pétillent de malice à ces révélations, puis de franc plaisir quand elle évoque Axelle Ropert, la réalisatrice de Tirez la langue, Mademoiselle lui disant: « Mais mange, ma fille! » et lui faisant porter des vêtements mettant en valeur une carrure et des hanches que tant d’autres veillaient à lui faire dissimuler, « comme si les hommes voulaient se protéger d’une image trop puissante et conquérante de la femme… » « C’était une belle respiration!« , clame celle qui avait au contraire voulu perdre du poids pour jouer Sandra dans Un beau dimanche, « car c’est un personnage malmené par la vie. »

En toute légitimité

Louise Bourgoin a beaucoup appris du travail avec Garcia, elle-même comédienne passée derrière la caméra. « D’abord Pierre Rochefort est très grand, il n’y a donc pas eu besoin de tranchée ni d’escabeau!« , ironise-t-elle avant de faire partager son bonheur, elle qui se définit clairement comme féministe, de « jouer pour Nicole une de ces femmes libres, indépendantes, un peu dures et âpres. Des femmes moteurs, le contraire de ces femmes passives, tributaires, qu’on voit encore trop souvent à l’écran. Mon agent soutient ma démarche. C’est aussi l’agent d’Isabelle Huppert, dont on connaît l’exigence. Je ne me compare pas à elle, mais moi non plus je n’accepterais pas de jouer une femme qui soit la pièce rapportée, l’accessoire d’un homme. Sauf si le film la montre se révoltant, se rebellant contre ça, ou alors qu’il dénonce cette situation! »

Le plaisir d’être actrice, c’est dans l’incarnation que Louise le trouve. « C’est comparable à ce que je ressens dans l’observation et l’interprétation d’un sujet que je dessine, explique celle qui a une formation de plasticienne, je suis traversée par des émotions qui vont décider de la courbe de ma ligne. C’est de l’ordre de l’indicible. Dans le jeu comme dans le dessiné. Un proverbe chinois dit que quand on dessine un arbre, il faut être l’arbre… »

Avec Nicole Garcia, pas question de tricher! « Quand j’étais fatiguée, que je me disais que la caméra me suivant de dos, je pouvais me relâcher un peu, sortir de l’incarnation, elle le remarquait tout de suite et me rappelait à l’ordre en me disant: « Un dos, ça joue aussi!«  » Bourgoin déclare s’être sentie pour la première fois actrice à part entière devant la caméra de la réalisatrice de Place Vendôme. « J’avais ce sentiment de ne pas pouvoir me définir comme ces acteurs qui ont toujours rêvé de l’être et tout fait pour y arriver, puisque cela n’a pas été mon cas… Moi je n’avais pensé qu’à peindre et à dessiner! Jouer m’a d’abord apporté des émotions comparables. Mais pouvoir me dire actrice, en avoir le sentiment profond, c’est avec Nicole que c’est venu, à travers tout le travail physique qu’elle m’a fait accomplir, sans jamais recourir à cette psychologie dont elle dit qu’elle tue l’instinct de l’acteur. Elle mimait des actions et me les faisait refaire, mécaniquement (l’ouverture d’une porte de frigo, 40 fois…). J’étais comme une ouvrière, j’avais du coup plus l’impression d’exercer un métier. A travers cet engagement physique, je me suis senti une légitimité que je n’avais pas perçue auparavant. »

RENCONTRE Louis Danvers

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