Michel Verlinden
Michel Verlinden Journaliste

FAUT-IL DIRE « ARTISTES FEMMES » OU « FEMMES ARTISTES »? LA MAZEL GALERIE POSE LA QUESTION À LA FAVEUR D’UNE EXPO CONSACRÉE À CINQ CRÉATRICES… ET MONTE AU CRÉNEAU.

Elles

EXPOSITION COLLECTIVE, MAZEL GALERIE, 22, RUE CAPITAINE CRESPEL, À 1050 BRUXELLES. DU 06/06 AU 12/07.

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C’est une question épineuse: faut-il distinguer et, dans le même temps, faire la promotion de l’art au féminin? Rien de moins évident certes, mais elle doit être posée car hommes et femmes ne sont pas égaux en la matière, quoi qu’on en dise. Le débat n’est bien sûr pas nouveau. Certains se souviennent peut-être du fameux « Faut-il que les femmes soient nues pour entrer au Metropolitan Museum? Moins de 5 % des artistes de la section d’art moderne sont des femmes, mais 85 % des nus sont féminins » affiché dans les rues de New York en 1989 par les Guerrilla Girls, groupuscule féministe. Vingt-cinq ans plus tard, une institution culturelle française s’est fixé pour mission de combler ce vide. En effet, au premier trimestre 2009, le Centre Pompidou présentait Elles@centrepompidou, une exposition labellisée 100 % féminin. Pourtant l’initiative n’a pas fait l’unanimité. D’abord, parce que la présence du sponsor Yves Rocher a fait se dresser plus d’un poil: difficile de faire mieux dans le genre instrumentalisation par la bande. Ensuite, parce que nombreux ont été les spectateurs qui ont pensé que dédier une exposition aux femmes consistait à revenir à un séparatisme sexiste d’un autre temps. En 2012, un autre épisode a fait grand bruit, celui du refus d’une oeuvre de Joana Vasconcelos lors de son solo show à Versailles. La pièce incriminée? La Fiancée, soit un lustre constitué de milliers de tampons hygiéniques rappelant avec trop d’emphase une facette de la féminité qu’il n’est pas « convenable » de donner à voir au grand public. N’est-il pas légitime de s’interroger sur le malaise généré par cette oeuvre?

Halte au confidentiel

Edouard Mazel de la galerie éponyme pense que « même si aujourd’hui la légitimité de la création des artistes femmes ne peut souffrir d’aucune remise en question elle a besoin d’être défendue afin d’établir une fois pour toutes son identité« . A regret, le galeriste pointe une « certaine confidentialité des femmes artistes sur la scène internationale« . Du coup, il dégaine l’exposition Elles qui entend s’intéresser à « la sensibilité artistique et plastique qui leur est propre par essence« . Pour ce faire, il a convoqué cinq signatures évoluant dans des registres différents: Claire Fanjul, Maike Freess, Piet.sO, ACBE et Laurina Paperina. Parmi ces noms, on en retient tout particulièrement deux. D’abord, Claire Fanjul dont le talent de dessinatrice et de graveuse fait l’unanimité. On aime son univers fouillé, chargé et savant -elle possède un doctorat en Histoire de l’art- qui n’est pas sans rappeler à certains moments l’esthétique tourmentée d’un Jérôme Bosch. Bien vu également, le travail que cette Française née à Liège a signé pour la tribu parisienne du Fooding. Autre personnalité à sortir du lot, Laurina Paperina, qui manie avec beaucoup de talent l’ironie dessinée. L’Italienne esquisse des récits drôles et féroces qui écornent tant la politique que l’art contemporain. Un talent qui saute tout particulièrement aux yeux lorsque l’on découvre le portrait hilarant qu’elle a fait d’ORLAN.

WWW.MAZELGALERIE.COM

MICHEL VERLINDEN

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