Louis Danvers
Louis Danvers Journaliste cinéma

Frissons à l’espagnole – La peur offre de nouveaux visages dans REC et El Orfanato, sommets récents d’un cinéma fantastique espagnol décidément en plein boom.

(1) De Juan Antonio Bayona. Avec Belén Rueda, Fernando Cayo, Roger Princep. 1 h 41. Dist: A-Film. – (2) De Jaume Balaguero et Paco Plaza. Avec Manuela Velasco, Ferran Terraza, Jorge-Yamam Serrano. 1 h 15. Dist: Paradiso.

Faut-il remonter au passé lointain de l’Inquisition et son cortège de tortures au nom de la foi, aux peintures et sculptures doloristes ensanglantant nombre d’églises du pays, sans oublier la tradition de la corrida, pour trouver les sources de cette capacité qu’ont les artistes espagnols pour saisir l’horreur dans toute sa tragique plénitude? Le cinéma s’affiche aujourd’hui comme héritier d’une tradition qu’il mélange, consciemment ou pas, avec les codes du film de genre hérités du gothique anglo-saxon via Hollywood et la Hammer britannique. Les heureux hasards de l’édition DVD font sortir simultanément 2 preuves éclatantes de cette vigueur créative. Eclatantes et on ne peut plus différentes. Car le classicisme épuré d’ El Orfanato et le trash ultra réaliste de REC n’ont en commun que le talent et la peur.

C’est au meilleur cinéma de hantise, entre autres illustré par son compatriote Alejandro Amenabar dans The Others (en 2001), que Juan Antonio Bayona nourrit son remarquable film. Un couple y habite un ancien orphelinat. Laura fut pensionnaire des lieux. Mère elle-même d’un petit garçon adopté, elle souhaite, avec son mari, faire de la vaste et belle demeure un home pour enfants handicapés. Son fils ignore qu’elle n’est pas sa maman biologique, et qu’il est séropositif. Gamin plein d’imagination, il a quelques amis invisibles, comme d’autres enfants s’en inventent pour tromper leur solitude. Sauf que les amis imaginaires de Simon existent peut-être vraiment… El Orfanato installe avec maîtrise un climat de trouble et d’inquiétude. Mesurant ses effets et soignant la forme, il nous emmène dans un cauchemar éveillé où les conventions du terrible secret enfoui dans le passé, des fantômes meurtris revenant hanter les vivants, trouvent une nouvelle jeunesse. Emmenée par l’excellente Belén Rueda ( Mar Adentro d’Amenabar), la distribution s’inscrit parfaitement dans l’atmosphère à la fois morbide et poétique du film. Geraldine Chaplin faisant une apparition saisissante en médium, dans un ensemble captivant de bout en bout, et osant adosser l’amour à l’horreur avec une force inédite.

L’enfer des zombies

Changement radical de style avec REC, le film déjà culte de Jaume Balaguero et Paco Plaza. Ce faux reportage nous plonge, sur les traces d’une journaliste et de son cameraman, dans l’enfer d’une maison de Barcelone où une étrange maladie transforme de paisibles habitants en zombies assoiffés de sang. C’est filmé à l’épaule par le cameraman, dans une ambiance d’autant plus terrifiante que tout se passe en huis clos, la police ayant isolé la bâtisse pour raisons sanitaires. On y croit, on tremble et on savoure cette tranche de terreur réaliste en diable, évident rejeton de C’est arrivé près de chez vous et auquel ses auteurs ont déjà donné une suite, REC 2, qui sortira le 23 décembre.

2 DVD sans bonus mais à ne pas manquer. Avec à l’esprit des plaisirs futurs. Car Juan Antonio Bayona n’a que 34 ans, Jaume Balaguero et Paco Plaza en ayant respectivement 41 et 36. L’avenir s’annonce radieux pour les amateurs de frissons dans la péninsule ibérique…

Louis Danvers

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