De Laurent Cantet. Avec François Bégaudeau, Nassim Amrabt, Laura Baquela… 2 h 08. Sortie: 01/10.

Auteur de films en prise sur le réel ( Ressources humaines) ou sur la désagrégation sociale ( L’emploi du temps), Laurent Cantet signe, avec Entre les murs, une fiction-documentaire au carrefour de ces préoccupations. Plongée dans l’univers scolaire, et les enjeux y attenant, voilà une £uvre posant judicieusement la question du monde de demain, plaçant la transmission et sa difficulté au c£ur même de son propos.

Ni lieux communs ni préjugés

Adaptant le livre écrit, sur base de son expérience, par François Bégaudeau, un ancien professeur, le cinéaste plante sa caméra dans une classe de 4e d’un collège parisien difficile, pour en livrer une passionnante chronique. Si le film qui en résulte est du ressort de la fiction, sa matrice est bel et bien la réalité: outre Bégaudeau lui-même, dans le rôle du professeur de français, Laurent Cantet a en effet fait appel à tous les acteurs – élèves en particulier – d’un établissement scolaire, le résultat à l’écran n’étant autre que le fruit d’ateliers conduits pendant un an.

A l’abri des lieux communs – mais sans occulter aucune facette de la situation qu’il ausculte, ne se voulant ni pontifiant ni angélique donc -, Entre les murs déploie une dynamique particulièrement stimulante. Ce, au gré de joutes oratoires toniques – la langue est un enjeu ouvrant sur d’autres -, d’échanges questionnant la légitimité du détenteur du savoir, de décalages à répétition, de crises pas toujours larvées, de dérapages des uns ou des autres et des arbitrages à suivre.

Soit le film d’un combat pour l’éducation, et une £uvre convoquant des sentiments divers à mesure que le spectateur s’installe parmi ce professeur et ces élèves – courageuse, sans nul doute, mais aussi drôle, émouvante ou affolante suivant les moments. Une £uvre vivante, aussi, qui voit, chemin faisant, Laurent Cantet poser les contours, délicats, d’un apprentissage scolaire qui est aussi celui de la démocratie et de la vie en commun.

Enjeux fondamentaux

L’une des grandes qualités d’ Entre les murs est d’aborder son sujet sans préjugés, de quelque ordre que ce soit; l’école est aujourd’hui un chantier que l’on ne saurait appréhender suivant quelque attitude dogmatique. Voilà un débat qui méritait largement d’être ouvert, qui plus est avec le talent d’un cinéaste ayant réussi – aidé par des interprètes non-professionnels d’une formidable spontanéité et d’un aplomb considérable – à faire de cette salle de classe le cadre d’enjeux sociétaux fondamentaux.

De quoi donner à son film un tour universel n’ayant pas échappé au jury de Cannes qui, en lui octroyant la Palme d’or, a couronné un film en phase avec le monde et ses lendemains. Mais aussi une £uvre inscrivant, avec quelques autres, le cinéma dans une dynamique nouvelle, au confluent de la fiction et du documentaire. Une franche réussite et, s’agissant d’enseignement, un film que l’on serait enclin à qualifier d’utilité publique.

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JEAN-FRANçOIS PLUIJGERS

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