DRAGON QUEST SE DRESSE COMME UN MONUMENT AU JAPON. L’ARRIVÉE EUROPÉENNE TARDIVE DE SON SEPTIÈME VOLET SONNE COMME UN RADIEUX ANACHRONISME.

Dragon Quest VII: La quête des vestiges du monde

ÉDITÉ PAR SQUARE ENIX HOLDINGS ET DÉVELOPPÉ PAR ARTEPIAZZA, ÂGE: 12+, DISPONIBLE SUR IOS, ANDROID ET NINTENDO 3DS (VERSION CHRONIQUÉE).

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Les salariés japonais fuient les congés. L’an dernier, le gouvernement nippon a tenté de voter une loi les obligeant à prendre au moins cinq jours de repos annuel. Voir des étudiants et des salarymen s’absenter de leur travail pour la sortie d’un nouveau Dragon Quest donne la mesure de la fascination exercée par ce jeu de rôle culte. Depuis 1988, la loi nippone a tranché: chaque nouvel opus ne peut débarquer un jour ouvré. Rien de tel sous nos latitudes. Inexplicablement absent de nos écrans de 1986 à 2006, Dragon Quest boucle discrètement la lente et tardive localisation de ses neuf épisodes principaux avec La quête des vestiges du monde.

Ces dix dernières années, les rééditions francophones inédites de la série se sont multipliées, notamment sur PlayStation 2, DS, Android et iOS. La jubilation flirte avec la découverte d’un album des Beatles qui n’aurait jamais été publié. Dragon Quest VII: La quête des vestiges du monde fait d’autant plus plaisir qu’il totalise 80 heures de jeu, soit huit fois plus que la moyenne actuelle. Certes, pour y arriver, la production sortie à l’origine sur PlayStation 1 multiplie les allers-retours fourbes. Elle perd aussi le joueur dans des labyrinthes déclenchant des combats où l’on martèle la touche d’attaque sans réfléchir.

Indé avant l’heure

Mais l’univers et le scénario en gigogne de ce marathonien du jeu vidéo happent. Enfilant le bandana du fils d’un pêcheur téméraire, le gamer y découvre une île dont la population est convaincue d’être seule sur terre. Un village tragique où les habitants détruisent leurs maisons. Un autre où transparaît le mythe de Cassandre. Au-delà de sa trame principale entre civilisation et dieux oubliés, le jeu de rôle ménage une foule de courtes histoires brillantes. Sentiments de trahison ou de culpabilité s’y étalent avec une simplicité désarmante que nombre d’indés effleurent à peine.

Il faut soigner les personnages de son équipe avant que leur barre n’atteigne zéro, gérer leurs évolutions et utiliser des magies offensives avec parcimonie. Entouré d’un prince tête à claques et d’une pimbêche pot de colle rythmant l’écriture, on reprend rapidement ses marques dans un système de combat en voie d’extinction. Fourmiliers roses à la langue bien pendue, cactus farceurs, chenilles aux lèvres siliconées et autres chats magiciens tapissent le bestiaire des joutes au tour par tour. La patte d’Akira Toriyama, le père de Dragon Ball donne un relief saisissant à l’édifice RPG.

Pas de carte GPS avec une flèche à suivre ici: pour se diriger, il faut retenir des indices dans des dialogues de PNJ (1). Parfois, on tourne en rond pour une bête mauvaise réponse dans un dialogue. Pas grave. Magistrale, l’incroyable BO maintient la bonne humeur. Fanfares, rêve en suspension et sarabandes: les thèmes orchestraux baroques de Koichi Sugiyama n’ont pas d’équivalent. Le compositeur et chef d’orchestre a sorti ses bandes originales des consoles pour les amener dans de vraies salles de concerts philarmoniques. Raison de plus pour prendre congé…

(1) PERSONNAGE NON JOUEUR

MICHI-HIRO TAMAÏ

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