Caroline Music

© Rough trade records

Un groupe anglais aux chansons taclées par une proto-liturgie spleeneuse, des londoniens aux impressions expérimentales américaines. Un sacré disque.

Quand un disque arrivé de nulle part tombe dans l’oreille. On a récemment découvert un octuor de sept garçons et une fille, par Good Morning (Red), titre s‘enfonçant tout de suite dans sa narration gommeuse portée en intro par un violon en country lymphatique tiède, avec un peu de paille dans la mélodie. Une millionième déclaration d’amour americana? Pas seulement. Une fois installé dans un confort d’écoute, un glorieux et bizarre cri lointain vient perturber la quiétude, suivi d’un break instrumental aux tentations dissonantes. Intrigué et même bluffé, on prolonge l’écoute jusqu’au clip qui confirme l’insularité de la proposition: dans un studio de tournage, la caméra navigue entre une maquette de pré boisé jusqu’à l’éblouissement des sunlights et puis file vers une immersion dans un noir qui vire au bleu. La version colorisée d’un Soulages en un plan-séquence assumé. Drôle de séduction qu’il faut donc vérifier sur la longueur d’un album à dix morceaux.

Caroline Music

Caroline débute ses activités en 2010 en trio post-punk, soit Jasper Llewelynn (voix, violoncelle, batterie), Mike O’Malley (guitare) et Casper Hugues (chant, guitare). Les cinq autres membres qui sont venus s’ajouter au fil de la décennie modifient forcément la teneur musicale, l’amenant aux sphères actuelles. Un rock expérimental qui peut rappeler la fronde et le maelström sans étiquette des Québécois de Godspeed You! Black Emperor. Même si ici, le mur du son fruité est à 180 degrés. La façon de faire déraper la musique se positionne à l’inverse des Canadiens précités.

Petit Jésus

Sur son premier album -il a pris son temps-, le groupe anglais vise le dépouillement plutôt que la blitzkrieg sonore. Oh oui, il y a bien l’un ou l’autre moment de complaisance, comme dans Skydiving onto the Library Roof, nettement moins bien, à chipoter vainement sur la chanson, que son titre à la Magritte. Sinon, l’élément supérieur de la proposition de Caroline -nom idiot surtout sur Internet- tient, dans ses manières de foirer, bien la route convenue sans finir dans le fossé. Et puis il y a aussi le petit Jésus de l’inspiration qui plane sur plusieurs titres. Dans la présente époque, cela fait un énorme bien d’entendre une musique qui refuse les territoires, la définition de tout espace contrit, la notion de communication vulgarisée . C’est pour cela aussi que toutes les allusions vocales au répertoire religieux de Caroline, le brillant mix des vocaux, donnent quelque chose d’unique à ce moment de musique.

Caroline

« Caroline »

Distribué par De Konkurrent.

8

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