Plus ou moins vrais que nature, des centaines de « tribute bands » ressuscitent les Fab Four aux quatre coins du monde. All you need is love…

Il ne s’habille pas Beatles. Il n’a pas la coupe de cheveux Beatles. Pourtant, Yves Laloux est un peu le Paul McCartney de Namur. Yves est le bassiste d’Abbey Road. Un groupe qui a décidé, il y a plus de 20 ans maintenant, de n’interpréter les chansons que d’un seul groupe. Pas le sien. Non. Celui de John, Paul, George et Ringo.

 » Nous n’avons jamais voulu nous déguiser, insiste-t-il comme pour nous assurer qu’il ne vit pas la musique par procuration . Les Beatles ont existé. Leur image s’est immiscée dans l’inconscient collectif. Et nous n’avons pas la même tête qu’eux. Nous aurions pu mettre des perruques mais ce n’est définitivement pas notre truc. »

Abbey Road a toujours pris les choses avec pas mal de recul. Son idée est d’ailleurs de revisiter les 4 garçons dans le vent de manière aussi moderne qu’il le peut.  » Avec des guitares actuelles, des amplis qui n’existaient pas à l’époque et des claviers qui nous permettent d’interpréter ce qu’ils ont enregistré après 1966. Tout le monde connaît les Beatles. Plus que les faire découvrir, nous voulons les faire revivre sur scène. »

Le phénomène « Tribute Acts » est né à la fin des eighties et s’est particulièrement développé dans les années 90. Les Tribute bands, dont le nom (AC/DShe, Mini Kiss…) consiste souvent en un vilain jeu de mot (le premier est constitué de femmes, le deuxième de nains), reprennent sur scène le répertoire des plus célèbres groupes de l’histoire. La plupart du temps morts ou qui ont arrêté de tourner.

Les dernières pages des magazines anglais regorgent de petites annonces pour ce genre de projets. De l’autre côté de la Manche, plutôt que de se payer un DJ local ou un groupe du coin pour un anniversaire ou un mariage, on préfère souvent faire appel à ce type d’artistes. Dans le fond, c’est un peu comme si on pouvait se permettre d’acheter les services des Stones, de Blur ou d’Oasis.

Avec les imitateurs d’Elvis, les faux Beatles sont sans doute l’espèce la plus répandue.  » Les Beatles restent le groupe phare. Celui qui a fait avancer la musique de dizaines et de dizaines d’années, pointe Yves Laloux . Les Anglais nous ont laissé un patrimoine extraordinaire, un répertoire exceptionnel, une véritable mine d’or. Pour un musicien, les Beatles incarnent la possibilité de toucher à tout. Le folk, la pop, le hard rock, le concept album et le quatuor à cordes… »

Abbey Road a joué avec Pete Best, le premier batteur des Fab Four, ou encore avec Tony Sheridan qui, au début des années 60, se faisait accompagner des Scarabées. Son heure de gloire remonte toutefois à 1994. Sur l’invitation de Joe Flannery, ancien employé d’Epstein, chargé du booking des Beatles, Abbey Road s’est produit à Liverpool.  » Il nous a dit que nous ne ressemblions pas aux Beatles. Ni dans la musique, ni dans le look. Mais que l’énergie que nous dégagions l’y faisait penser. Nous sommes partis en avion avec une centaine de Belges. Ca va vous faire rire. Les 80 % du public restant étaient composés de Japonais et de Chinois. »

L’Asie aime les cover bands. Au Fuji Rock, un festival accueillant 80 000 personnes, les Anglais de Counterfeit Beatles ont déjà partagé l’affiche avec Primal Scream et Coldplay.

Quand les Beatles rencontrent Metallica

A y regarder de plus près, le Tribute act flirte souvent avec le mimétisme. Outre la musique, qu’ils tentent généralement de reproduire au plus proche des versions originales, les cover bands ont tendance à célébrer le culte du sosie.  » Ils essaient de coller autant au son qu’à l’image, remarque Yves Laloux . Le problème selon moi, c’est qu’il n’existe pas une seule image ou une seule identité Beatles. Qui incarner? Les garçons de bonne famille, les hippies, les membres du Lonely Hearts Club Band?  »

Certains se sentent pousser des ailes. Prennent de folles libertés. A l’instar des Dread Zeppelin, qui jouent des reprises de Led Zep en version reggae, et de Gabba, qui revisite Abba à la façon des Ramones, Beatallica ose le choc des cultures en interprétant du Beatles à la manière de Metallica. Sony Music a menacé d’attaquer le groupe en justice mais grâce à l’aide du batteur du plus grand groupe de métal au monde, Lars Ulrich, Beatallica a remporté son combat. Il enregistre et tourne d’ailleurs encore aujourd’hui.

Car oui, on peut très bien être un tribute band et enregistrer des albums. Abbey Road en a sorti trois. Il s’est même osé à quelques musiques originales.  » Des morceaux dans l’esprit des Beatles. Mais je dois l’avouer, il s’agissait d’une tentative casse-gueule. Imaginez-vous sur scène, interpréter une de vos petites compos sympas avant un tube planétaire. Les gens se demandent quoi. Les gens ne comprennent pas. »

Plutôt que de chercher à vivre de leur propre musique, les tribute bands mettent en veilleuse leurs frustrations d’artistes. Pour certains, le commerce de la nostalgie devient rapidement plus rémunérateur que le lancement d’une carrière.

En 2002, la première autobiographie d’un Tribute band a été publiée par SAF à Londres. Ecrit par Martin Dimery, Being John Lennon raconte avec humour la vie sur la route des Sgt. Pepper’s Only Dart Board Band. Ca ne s’invente pas.

En attendant, le rêve d’Yves Laloux n’est sans doute pas bien différent de celui qu’entretiennent tous les clones des Beatles, de Sao Paulo à Tokyo.  » Ce serait de jouer quelques instants avec Paul McCartney. Je suis sûr qu’il a déjà entendu parler de nous mais je ne sais pas ce qu’il en pense. S’il éprouve un petit sentiment de fierté que des groupes reprennent encore aujourd’hui son répertoire ou s’il est convaincu qu’on se fait du blé sur son dos. En fait, je pense qu’il s’en fout. »

www.myspace.com/abbeyroadbe

Abbey Road en concert à Binche le 13/9, à la Maison de la culture de Namur le 16/9, aux Fêtes de Wallonie le 21/9 et à Mons (Beatles Day) le 3/10.

Texte Julien Broquet

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Partner Content