Balèze (Une histoire américaine)

Dans le récit autobiographique qu’il adresse à sa mère, Kiese Laymon relate son adolescence dans le Mississippi jusqu’à son arrivée à New York, en tant qu’universitaire puis comme prof de lettres. C’est la confession d’un fils à la doctorante engagée dans les combats politiques qui lui achète des encyclopédies « pour le protéger des Blancs ». Évoquant cette mère divorcée aussi brillante que sévère, Laymon retrace les coups distribués par celle qui avait faim de victoires noires. « À Jackson, se faire fouetter était tellement moins brutal que se faire tabasser (…). » Se remémorant les expériences de violence qui ont jalonné sa vie, Kiese scrute inlassablement son poids – il pèse bientôt 123 kilos-, et ce que cela dit de « l’opulence noire », se traduisant non seulement dans la ferveur, un goût certain de la tchatche, mais aussi dans la physionomie et le maintien du corps. « Les gâteaux ne ripostaient jamais. » Dans un pays « entraîné à fétichiser et punir les corps noirs », perdre du poids devient alors une conquête, un but émotionnel et spirituel pour aider à oublier les institutions racistes, les lettres de menace, les violences policières. Pour écrire vrai, sur la culpabilité, le sexe, la violence envers les filles, les troubles obsessionnels (il sera aussi accro au jeu), Laymon creuse les stigmates d’une recherche pour parvenir à plaire sans mentir. Dans le sud des États-Unis, tabassé par les injustices, il déploie une prose combat habitée par la colère et la poésie, à vif. Balèze.

De Kiese Laymon, éditions Les Escales, traduit de l’anglais (États-Unis) par Emmanuelle et Philippe Aronson, 288 pages.

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