3D Realms ferme boutique laissant derrière lui Duke Nukem Forever, la plus grande fumisterie de l’histoire du jeu vidéo. Retour sur une vaine attente longue de 12 ans.

La fermeture définitive de 3D Realms clôt un chapitre clef de l’histoire du jeu vidéo. Artisan fondateur du genre First Person Shooter aux côtés d’iD Software et d’Epic Games, ce studio de développement texan a largement £uvré au glissement des jeux vidéo de la 2D à la 3D au milieu des années 90. Aujourd’hui, après le départ d’un de ses deux dirigeants et le refus d’un ultime financement de Take Two, son éditeur, l’équipe déclare forfait. Une mort que peu de joueurs semblent pleurer. Il faut dire que le studio a indéfiniment joué avec leurs pieds, repoussant depuis douze ans la sortie du très attendu Duke Nukem Forever.

Grand adepte de série Z second degré, 3D Realms, ce Tarentino du jeu vidéo avant l’heure, a toujours badigeonné ses productions hamburger de sang ketchup. Celui qui gicle après un coup de katana dans Shadow Warrior ou de faucille dans le satanique Blood. Bien plus que ces deux titres sortis en 1997, Duke Nukem 3D s’est érigé en icône nineties des jeux vidéo, au même titre que Lara Croft. Cigare en bouche et pin up dénudée au bras, le Duke style tranchait avec la SF glaciale, gore et sérieuse de Doom, son concurrent direct sorti trois ans plus tôt.

Bouc émissaire de la violence juvénile (cf. Columbine), Duke Nukem 3D débouchait les naseaux en mode sex, drugs and rock’n’roll dans une improbable histoire d’invasion de mutants phacochères. Mais ce red neck body buildé et décontracté a surtout révolutionné le gameplay FPS en apportant une foule d’interactions avec le décor et des déplacements jamais vus. Saut, nage, vol en jetpack, la parodie de ce Schwarzenegger désuet décloisonne les mouvements. Les codes vidéoludiques aussi. le Duke utilise des billets de banque comme arme face à des strip-teaseuses… Bref, Duke Nukem 3D est l’hymne rock du jeu vidéo. Un Back In Black d’AC/DC au joystick.

waiting forever

Mieux, ses gadgets, entre lunettes de vision nocturne et hologramme trompe-l’£il, rénovent les combats. Des ingrédients aujourd’hui évidents, comme la possibilité de tourner la tête à 360° ou la présence d’un viseur complètent ce palmarès. Les gamers jubilent. En 1997, une suite , Duke Nukem Forever est annoncée. L’attente s’éternise depuis douze ans. Plusieurs fois lauréat du titre Vaporware de l’année (1), le jeu-illusion finit par énerver jusqu’à ses fans les plus convaincus, à coups de bandes-annonces fumeuses et de screenshots jamais concrétisés. Un plateformer satirique en 2D dénommé Duke Nukem: Waiting for Forever est même consacré à cette attente. Du jamais vu.

3D Realms tente de livrer un produit d’avant-garde, un cran supérieur technologiquement et graphiquement à ses concurrents. Ce qui entraîne des mises à jour continuelles et une plongée dans un cercle vicieux de retards. Entre-temps, le studio survit en écoulant sans effort la licence Duke Nukem au fil d’une trentaine de spin off bas de gamme, allant du correct ( Duke Nukem: Manhattan Project) à l’exécrable ( Duke Nukem: Land of the Babes). Au passage, les Texans éditent l’excellent Prey, FPS indispensable sur PC et Xbox 360, gorgé de bonnes idées et qui a influencé Portal. Mais toutes les bonnes blagues ont une fin. Cette volonté d’être au top de la technologie a finalement précipité la perte du studio. Désormais propriétaire de la licence Duke Nukem, Take-Two Interactive, son éditeur leur a claqué la porte après avoir investi 12 millions de dollars dans un jeu fantôme. La sortie de Duke Nukem Forever, reste donc à l’ordre du jour. On préfère ne pas savoir pour quand.

(1) Classement des innovations technologiques

annoncées à grands coups de battage médiatique qui ne se concrétisent jamais.

Michi-Hiro Tamaï

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