L’ABC DU CINEMA D’Antonioni à Truffaut, une nouvelle collection cadre l’ouvre de cinéastes majeurs.

Editions Taschen, 96 pages.

Michelangelo Antonioni, Stanley Kubrick, François Truffaut: c’est par trois figures emblématiques que les éditions Taschen ouvrent une nouvelle collection consacrée au cinéma, à travers ses auteurs (sont encore annoncés Buñuel, Polanski ou Verhoeven) mais aussi ses genres (avec des recueils à venir sur le film noir ou le cinéma érotique).

Suivant ce qui est désormais une tradition, chaque ouvrage allie présentation léchée et contenu faisant autorité tout en se voulant accessible – de la vulgarisation bien pensée, en somme. Du reste, si l’£uvre des cinéastes considérés n’a sans doute (?) plus de secrets pour les cinéphiles, et a déjà fait l’objet d’une prose abondante, elle se prête aussi magnifiquement à un décryptage en règle. C’est l’approche privilégiée dans ces volumes, courts mais touffus, confiés chacun à un expert.

Plus que l’originalité du propos, on en soulignera donc la solidité, mais aussi la limpidité. Adoptant un schéma similaire, chaque ouvrage s’emploie à cerner les lignes de force du parcours personnel et de l’£uvre, avant de procéder à une analyse systématique et une mise en perspective des films. Dans le chef de Stanley Kubrick, par exemple, c’est notamment la volonté d’indépendance, très tôt manifestée, que met en exergue Paul Duncan. Non sans en souligner l’inévitable corollaire financier, l’argent étant le nerf de ce combat vers l’autonomie créative.  » Quand on fait du cinéma, le tout n’est pas de remporter des succès mais d’éviter les échecs, car chaque échec diminue vos chances futures de faire les films que vous voulez » , observe Kubrick, pragmatique.

GENE TIERNEY CHEZ ANTONIONI

Spécialiste d’Antonioni, Seymour Chapman se réfère pour sa part au discours fameux que consacra en 1980 Roland Barthes au metteur en scène de L’Avventura, pour isoler ses trois vertus essentielles:  » la vigilance, la sagesse et… la fragilité » . Ce, non sans établir des correspondances esthétiques passionnantes entre les £uvres du grand cinéaste de la modernité qui affirmait: « Mes films sont toujours des travaux de recherche.  »

Quant à Robert Ingram, auteur du volume consacré à François Truffaut, il s’attache à la continuité thématique d’une filmographie confrontant les notions d’absolu et de provisoire. Tout en relevant l’omniprésence de l’amour dans l’£uvre –  » le sujet des sujets« , selon l’expression même du cinéaste à l’époque de Jules et Jim.

Le propos n’est pas pour autant exclusivement théorique. On y découvre moult anecdotes – ainsi celle voulant que Kubrick, perfectionniste comme toujours, ait fait lancer 1 000 tartes par jour pendant une semaine à George C. Scott, pour une scène finalement coupée au montage de Dr Folamour. On apprend encore le peu de considération que Truffaut avait pour L’amour en fuite, le dernier volet du cycle Doinel, qu’il qualifiait d' » escroquerie » .

Et on ne peut s’empêcher de rêver de Chronique d’un amour avec Gene Tierney, à qui Antonioni voulait confier le premier rôle, avant de renoncer parce que  » c’était demander la lune » . Autant dire que sérieux, agréables et relevés d’une iconographie de choix, ces ouvrages touchent aussi à la magie du Septième art.

u www.taschen.com

JEAN-FRANçOIS PLUIJGERS

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