Laurent Hoebrechts
Laurent Hoebrechts Journaliste musique

Blacc power Avec son hit I Need A Dollar, Aloe Blacc a réussi à combiner soul music et commentaire social. Confirmation avec Good Things, son excellent 2e album.

« Good Things »

Distribué par Stones Throw/V2.

C’est l’un des hits du moment. Avec I Need A Dollar, Aloe Blacc a réussi le coup parfait: pondre un tube aussi instantané que malin. Emmené par un piano entêtant, il y manie un sens du storytelling d’une efficacité rare, un peu à la manière d’un Bill Withers. Avec au bout du compte un propos social que l’on n’entend plus forcément beaucoup dans les charts. « If I share with you my story, would you share your dollar with me? », lance-t-il notamment, tout à fait à l’aise dans le rôle de celui qui vient de perdre son boulot. Normal: cette situation, le bonhomme, né en 1979 de parents panaméens exilés aux Etats-Unis, l’a directement éprouvée. « Je travaillais comme consultant dans une grosse boîte. Le jour où les patrons ont voulu la revendre, ils ont fait des coupes dans les effectifs, histoire de rendre l’offre plus attrayante pour les candidats repreneurs. Du jour au lendemain, j’ai été viré. Mais ce n’est pas grave. Au bout du compte, je pense être plus utile à la société comme chanteur que comme consultant. »

Say it loud

En perdant son boulot, Aloe Blacc se lance donc pour de bon dans la musique. En commençant par le hip hop. « Dès 5 ans, j’écoutais du rap, et je dansais le breakdance. » Aujourd’hui, pourtant, le bonhomme a quasi complètement viré sa cuti. Good Things, son 2e album sorti ces jours-ci, fonctionne ainsi quasi exclusivement sur une gamme soul, sinon vintage, en tout cas « classique ». Comme ils sont de plus en plus nombreux à le faire? Certes, sauf que pratiqué par Aloe Blacc, l’exercice ne semble jamais forcé, rendant même crédible sa reprise de Femme Fatale du Velvet Underground.

Surtout, Aloe Blacc investit la soul music pour mieux faire passer ses commentaires sur certaines réalités sociales. « Depuis toujours, la soul music a été utilisée comme véhicule pour des messages sociaux. Marvin Gaye chantait What’s Going On, James Brown Say It Loud, Stevie Wonder Living For The City, Sam Cooke A Change Is Gonna Come… Sans la soul, les choses auraient été différentes. Elle a contribué à donner une place aux Noirs en Amérique. Cela ne veut pas dire qu’elle n’avait pas une dimension d’entertainment, comme ce que faisait la Motown. Il fallait même que cet aspect soit présent. Si vous souriez, si vous avez du plaisir, peu importe la couleur de celui qui chante. » Il y a donc quelque chose de limpide dans Good Things. Musicalement, le disque ne révolutionne évidemment rien. Par contre, il réinjecte du contenu, des messages dans le genre.

A cet égard, après notamment le Wake Up! de John Legend accompagné des Roots, le disque d’Aloe Blacc semble confirmer que la soul se réengage dans le réel, là où le rap semble avoir abandonné tout message revendicatif. Le parcours de Blacc, passant de l’un à l’autre, en est l’exemple parfait. « La soul est la folk music des Noirs d’Amérique. Le rap a pu l’être aussi. Mais aujourd’hui, il n’appartient plus aux gens, mais aux grandes compagnies. C’est de la musique pour le commerce, pour le capitalisme. C’est le jeu, c’est comme ça. Le vrai hip hop existe toujours, mais il ne passe pas à la radio. » Dont acte…

En concert le 16/10 au Depot (Louvain), et le

17/10 au Vooruit (Gand).

Laurent Hoebrechts

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