Actrices-sorcières

Des histoires que lui lisait sa grand-mère pour l’endormir, le critique littéraire à Libération Thomas Stélandre a conservé un goût prononcé pour les sorcières et, par extension, pour celles qu’il appelle les Actrices-sorcières, ayant en commun de  » sortir du rang en incarnant la possibilité d’une autre voie. Dans les films, dans la vie, elles auront été autre chose que des princesses endormies. » Elles sont une dizaine à figurer au générique de cet ouvrage, de Margaret Hamilton, la méchante sorcière de l’Ouest du Magicien d’Oz en un retour au territoire de l’enfance, à Béatrice Dalle et sa  » soeur sorcière » Asia Argento, reliées par leur puissance de feu, mais aussi leur aptitude à s’épanouir dans la marge. Ou encore, pour paraphraser Jeanne Moreau, que l’auteur cueille dans sa  » période fauchée » en vagabonde du cinéma,  » des femmes qui refusent d’être ce qu’elles sont censées être, ce qu’on attend d’elles« . Disposition(s) que Thomas Stélandre traduit en une galerie de portraits inspirés -il y a là aussi Sheryl Lee, éternelle Laura Palmer sacrifiée sur l’autel de Twin Peaks, Jennifer Jason Leigh et son refus de jouer les faire-valoir, Eartha Kitt, la Catwoman des 60’s qui chanta,  » et c’était plus qu’un caprice » , I Want to Be Evil, Rose McGowan, passée  » d’actrice à activiste, d’objet à sujet« , et d’autres encore, comme Tilda Swinton, Emmanuelle Béart ou Sean Young. Pour livrer un ouvrage-gigogne qui inscrit la trajectoire de ces femmes dans une perspective plus vaste, Nan Goldin, Joan Didion, Cindy Sherman et autre Joyce Carol Oates apparaissant en guest stars de cet essai érudit et passionnant.