À pleines mains

S’il est bien un domaine que l’avènement d’Internet a profondément chamboulé, c’est l’industrie du sexe. Le glissement vers la vente en ligne du sexshop traditionnel -ses olisbos de latex multicolores, ses films vidéo crapax et autres magazines olé-olé- a entraîné de nombreuses fermetures d’officines spécialisées. Ainsi, Pablo se voit dans l’obligation de fermer le Sex Quest dont il était le patron et -ô suprême frustration- de revenir habiter chez ses parents. Mais dans sa chambre restée intacte depuis son départ, il retrouve ses pulsions libidineuses adolescentes et une idée de génie traverse son esprit. Il ne sera pas révélé ici la nature de son idée. Non pas qu’elle ferait retomber le soufflé mais laissons au lecteur le plaisir de la surprise. En partant du principe que les premiers émois sexuels déterminent le reste de la vie érotique, les auteurs vont, au travers de leur héros, jouer sur la nostalgie et la masturbation. La branlette est restée très longtemps synonyme de loser, d’obsédé sexuel. On s’attaque ici plus au tabou, en le traitant frontalement, qu’à ses bienfaits. Si on frôle souvent l’humour potache -le dessin « gros nez » et humoristique y contribue grandement-, les scénaristes abordent toutefois certaines idées « woke » de la sexualité, en distillant des conseils judicieux et bienveillants. Certains y verront, malgré l’ouverture aux multiples pratiques sexuelles rencontrées, une histoire très phallocentrée qui fait l’apologie de l’amour physique. Les auteurs ont sans doute puisé dans leurs souvenirs personnels. Ils ont toutefois réussi l’exploit de faire sortir leur personnage de son adulescence en lui faisant assumer ses choix. Gageons qu’ils réussissent leur coup avec le lecteur…

À pleines mains

De Thomas Cadène, Joseph Safieddine et Pierre Thyss, éditions Dargaud, 160 pages.

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