Louis Danvers
Louis Danvers Journaliste cinéma

FULGURANCES RETROUVÉES – UN SPLENDIDE COFFRET RESSUSCITE QUATRE FILMS STUPÉFIANTS, GRÂCE AU TRAVAIL EXEMPLAIRE DE LA WORLD CINEMA FOUNDATION.

(1) DE FRED ZINNEMANN ET EMILIO GOMEZ MURIEL. AVEC SILVIO HERNANDEZ. 0 H 58. DIST: TWIN PICS. – (2) DE DJIBRIL DIOP MAMBETY. AVEC MAGAYE NIANG, MAREME NIANG, AMINATA FALL. 1 H 27. DIST: TWIN PICS. – (3) D’ AHMED EL MAANOUNI. AVEC LE GROUPE NASS EL GHIWANE. 1 H 26. DIST: TWIN PICS. – (4) D’ ERMEK SHINARBAEV. AVEC ALEXANDRE PAN, OLEG LI, VALENTINA TE. 1 H 36. DIST: TWIN PICS.

Martin Scorsese s’est fait, depuis longtemps, le chantre actif de la préservation des trésors cinématographiques du passé, et de leur restauration. Celui qui sut soutenir la Cinémathèque Royale de Belgique en des heures difficiles, et dont le dernier film Hugo célèbre le pionnier du 7e art Méliès, est aussi -entre autres- à l’origine de la World Cinema Foundation. Cet organisme sans but lucratif a été créé en 2007, sur le modèle de The Film Foundation que Scorsese avait déjà lancé aux Etats-Unis, en 1990, avec Kubrick, Spielberg, George Lucas et Clint Eastwood. Le propos de la World Cinema Foundation est de retrouver et de restaurer des films appartenant au patrimoine cinématographique mondial mais qui ne peuvent plus être vus pour cause de dégradation de la pellicule. Une quinzaine de titres ont déjà bénéficié, à ce jour, de l’action de la fondation. Et quatre d’entre d’eux font l’objet d’une édition DVD, sous la forme d’un superbe coffret, qu’accompagne un livret de 36 pages. Scorsese introduit lui-même cet indispensable objet, expliquant sa démarche de préservation mais aussi de (re)découverte, rendant aussi hommage à ses complices de la Cinémathèque de Bologne, qui a pris en charge les travaux de restauration.

Merveilles ressuscitées

Les £uvres retenues viennent du Mexique, du Sénégal, du Maroc et du Kazakhstan. Toutes font preuve d’une grande originalité tant dans la forme que dans le propos. Et toutes sont riches de sensations uniques, de fulgurances dont une restauration exemplaire restitue tout l’éclat. Les Révoltés d’Alvarado (1931) célèbre dans un noir et blanc splendide la révolte de pêcheurs mexicains opprimés par des patrons multipliant les profits en revendant un poisson qu’ils ont pris dans leurs filets sans en obtenir une rémunération convenable. Coréalisé par le jeune Fred Zinnemann (futur réalisateur de High Noon) et photographié par un autre Américain, Paul Strand, c’est un film engagé exaltant, joué par des non-professionnels à la présence impressionnante de vérité. Si Les Révoltés d’Alvarado prend parfois des allures de documentaire, Transes en est un. Ce film marocain de 1981 capte la folle intensité des prestations scéniques du groupe Nass El Ghiwane, dont les chansons hypnotiques poussaient les foules vers un état d’extase. La grâce habite aussi Le Voyage de la hyène (1973), chef-d’£uvre du réalisateur sénégalais Djibril Diop Mambety. L’échappée belle d’un jeune couple projetant d’émigrer vers l’Europe et nourrissant son projet de petites et grandes arnaques est contée en images vives et sensuelles, d’une force et d’un érotisme fous. Un film inclassable, génial ovni made in Africa qu’il faut voir absolument. Comme il faut savourer l’aussi beau qu’énigmatique La Flûte de roseau (1989), récit d’une vengeance à la coréenne projetée durant de longues années, et chroniquée en images réalistes et poétiques à la fois, aux admirables couleurs pastel.

LOUIS DANVERS

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