Saharienne indigo

© National
François Perrin Journaliste

Paris, tournant des années 2000. Dans un Quartier Latin tissé de ragots et de toc, entre clochards et petits commerçants, deux femmes, apparemment opposées en tout, se télescopent puis se fréquentent, au rythme de petits verres servis au bistrot: Véronique Bangoura, auxiliaire de vie guinéenne poussant le fauteuil d’un soixante-huitard éteint, et madame Corre, vieille harpie détestable, Bourguignonne d’origine. Et pourtant, “ nous venons de la même déchirure”, reconnaîtra la première au terme de ce faux dialogue houleux et haut en couleur, qui permettra au lecteur, par petites touches, de découvrir leurs biographies heurtées, définitivement marquées par la violence politique du régime de Sékou Touré, dans une Guinée “ où l’on ne s’attend à rien d’autre qu’à la fringale et à la malaria, aux coups d’État et aux pendaisons publiques”. Au rythme des changements d’identité de l’une ou de l’autre, motivées par des unions, désunions ou révélations fracassantes, ces Véronique/Atou et Suzanne/Mathilde racontent un monde où les êtres ne pèsent pas lourd face aux délires totalitaires, où bourreaux et victimes ne forment que les deux faces d’une même médaille, frappée du sceau de la noirceur humaine. Ici, toutes les apparences sont trompeuses, et la sororité seule offre une fébrile planche de salut…

De Tierno Monénembo, éditions du Seuil, 336 pages.

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