Critique | Livres

« Pour qui je me prends » de Lori Saint-Martin ou le refuge de la langue

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© Ariane Gibeau

Lori Saint-Martin, éditions de L'Olivier

Pour qui je me prends

160 pages

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Anne-Lise Remacle Journaliste

Comment trouve-t-on refuge dans une langue? A-t-on la capacité de se réinventer à travers d’autres mots, d’autres sonorités, et par ce biais, intégralement? Lori Saint-Martin devenue francophone de cœur et par opiniâtreté répond ici par sa propre expérience, faite de “friction donc de fiction”. Celle qui fut autrice, traductrice (en binôme avec Paul Gagné, son mari -on leur doit notamment des traductions de Mordecai Richler, Miriam Toews, Thomas King), professeure d’université disait d’elle-même: “Je me prends, avant tout, pour une personne qui a deux langues maternelles”. Elle qui a grandi dans une famille ouvrière anglophone unilingue sait dès l’enfance qu’elle veut s’extraire de cet environnement qui l’étouffe et vit la découverte du français comme sa planche de salut. Au point de prendre la tangente radicalement, à 18 ans, et de quitter l’Ontario pour Québec: “J’ai jeté l’anglais, j’ai arraché ma peau pour être écorchée, terrifiée, renouvelée, comblée”. Avec autant d’acuité que Luba Jurgenson, autre traductrice transfuge linguistique par choix (Au lieu du péril, Sortir de chez soi), Lori Saint-Martin nous fait prendre conscience des dimensions corporelles, émotionnelles et émancipatrices de ce qu’est un idiome. Entre la petite fille à l’étroit et la femme multilingue apaisée, sa pensée n’a de cesse de danser.

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