Gen Paul: l’expressionniste français

Cœur d'amour, Java © courtesy galerie de la béraudière
Michel Verlinden
Michel Verlinden Journaliste

Envie de s’offrir un accrochage qui prend l’époque à rebrousse-poil? Une exposition qui sacre une esthétique, pourtant fondatrice, qui n’a plus vraiment cours, une sorte de “féerie pour une autre fois”? La Galerie de La Beraudière déroule le tapis rouge des grandes années -comprendre de 1925 à 1929- de l’œuvre de Gen Paul (1895-1975), enfant de Montmartre au destin marqué par une bohème frénétique, l’homme ayant roulé sa bosse à travers le monde, et un usage déraisonnable de l’alcool. Avec une mère brodeuse et une façon inimitable de pratiquer l’argot, Paul évoque immanquablement un monde englouti, celui de Louis-Ferdinand Céline, dont il fut proche un temps avant que leurs destins ne se séparent et dont il illustra entre autres Mort à crédit pour les éditions Denoël. Ses tableaux évoquent d’ailleurs la lave en fusion de l’auteur du Voyage au bout de la nuit. Pour qui sait regarder au-delà du bornage contemporain, c’est une même fureur qui s’en échappe, un même excédent d’expressivité. Ceux-là mêmes qui font qu’à travers un usage chromatique savant et par le biais de lignes affranchies un musicien esquissé crève la toile -on s’attendrait presque à entendre des notes s’échapper de sa guitare. La musique tient une place importante dans sa peinture -également dans sa vie, lui qui créa une fanfare nommée “Chignolle”-, comme le prouve également cet accordéoniste (photo) à la justesse totale. Mais l’intéressé excelle aussi lorsqu’il s’agit de reproduire l’intensité concentrée d’une partie d’échecs, la gare de Joigny ou le plus trivial des étals de poissons, qui pour peu chatouillerait les narines.

À la Galerie de La Beraudière, à Bruxelles. Jusqu’au 30/06.

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