Critique | Cinéma

Origin: un voyage émotionnel dans les pas d’Isabel Wilkerson

3 / 5
3 / 5

Titre - Origin

Réalisateur-trice - D’Ava DuVernay

Casting - Avec Aunjanue Ellis-Taylor, Jon Bernthal, Niecy Nash

Durée - 2 h 21

Nicolas Clément
Nicolas Clément Journaliste cinéma

Dans Origin, Ava DuVernay invite à une véritable odyssée intellectuelle et émotionnelle à la suite de l’autrice Isabel Wilkerson.

Dans son livre Caste: The Origins of Our Discontents (2020), l’Américaine Isabel Wilkerson, lauréate d’un Prix Pulitzer en journalisme, analysait la question de la ségrégation de la communauté afro-­américaine en la comparant aux énormes inégalités inscrites dans la société indienne et même à la persécution des Juifs sous le nazisme, postulant in fine que la discrimination résulte au fond moins d’un racisme systémique que d’un système de castes profondément ancré dans la société. « Aux États-Unis, la race est l’agent visible de la force invisible des castes. Les castes sont les os, la race est la peau« , écrivait-elle ainsi par exemple dans cet ouvrage qui a rencontré un succès retentissant outre-Atlantique.

L’affichage de ce contenu a été bloqué pour respecter vos choix en matière de cookies. Cliquez ici pour régler vos préférences en matière de cookies et afficher le contenu.
Vous pouvez modifier vos choix à tout moment en cliquant sur « Paramètres des cookies » en bas du site.


Réalisatrice engagée des films Middle of Nowhere, 13th et Selma, mais aussi de la minisérie Netflix When They See Us, la Californienne Ava DuVernay choisit aujourd’hui de revenir sur les enjeux majeurs de cet innovant livre théorique en racontant la vie et le cheminement intellectuel d’Isabel Wilkerson au moment où elle s’apprête à l’écrire. Suivant l’intuition que les existences actuelles de millions d’Américains ont été largement déterminées par une hiérarchie tacite de divisions humaines remontant à plusieurs générations, celle-ci se plonge dans diverses histoires décisives du passé tout en devant faire face à une série de douloureuses tragédies personnelles au présent…

Entre intellect 
et affect

Passé par la Compétition de la dernière Mostra de Venise, le nouveau long métrage d’Ava DuVernay prend la forme, étonnante, d’un récit d’enquête académique, à la narration particulièrement ambitieuse. S’ouvrant sur les circonstances 
choquantes de la mort de Trayvon Martin, adolescent afro-américain 
tué par balle en 2012 alors qu’il marchait, non armé, dans un quartier de Floride, Origin brasse ainsi un nombre considérable de fils narratifs en naviguant très librement sur la ligne du temps. Nourri de nombreuses discussions spéculatives au cours desquelles sa pensée ne cesse de se préciser, le personnage d’Isabel Wilkerson, véritable point d’ancrage du film, vient régulièrement réorganiser ce maillage de récits en une succession d’intuitions intellectuelles dont il est passionnant de suivre la progression. 
Mais Origin n’offre pas qu’une expérience d’ordre cérébral et mental, c’est aussi à un véritable voyage émotionnel que le film nous convie. Avec hélas, souvent, une fâcheuse tendance à surcharger la barque affective. Dépositaire d’un classicisme hollywoodien tirant vers un académisme un peu pompeux, DuVernay use et abuse ainsi d’envolées violoneuses qui tendent à déforcer son propos en le noyant sous le sirop des sentiments. Parfois scolaire et démonstratif, son cinéma n’en reste pas moins stimulant.

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Partner Content