Critique | Cinéma

Anselm: le plasticien Anselm Kiefer vu par Wim Wenders

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© National
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Titre - Anselm

Réalisateur-trice - De Wim Wenders

Casting - Avec Anselm Kiefer, Daniel Kiefer, Anton Wenders.

Durée - 1 h 33

Jean-François Pluijgers
Jean-François Pluijgers Journaliste cinéma

Wim Wenders consacre un documentaire inspiré à l’artiste plasticien allemand Anselm Kiefer, dont il partage les questionnements.

La filmographie de Wim Wenders dévide de nombreux fils distincts, aux classiques incontestés –Paris, Texas, Les Ailes du désir ou prochainement Perfect Days– répondant les projets plus modestes (“L’histoire du cinéma est faite par les petits films”, observait-il tout récemment à Lyon, où il recevait le prestigieux prix Lumière); aux œuvres de fiction, les documentaires. Ainsi, aujourd’hui, de Anselm consacré au plasticien allemand Anselm Kiefer et qui s’inscrit dans une lignée féconde ayant vu le cinéaste de Düsseldorf tracer le portrait inspiré d’artistes aussi divers que les réalisateurs Nicholas Ray (Lightning Over Water) et Yasujirō Ozu (Tokyo-Ga), les musiciens du Buena Vista Social Club, le photographe Sebastião Salgado (The Salt of the Earth) ou, bien sûr, la chorégraphe et danseuse Pina Bausch (Pina).

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Comme pour cette dernière, Wenders opte dans Anselm (Le Bruit du temps) pour une 3D immersive, manière de s’insinuer au cœur de l’œuvre de Kiefer, la caméra serpentant entre ses toiles et ses installations monumentales notamment, passant de sa série Les Femmes de l’Antiquité aux curieuses tours qu’il a disposées dans le paysage de Barjac, dans le Gard, où il s’est installé en 1992, transformant une ancienne friche industrielle en vaste atelier.

Wenders privilégie une approche contemplative. Son regard glisse avec fluidité au fil des époques, des lieux et des créations de Kiefer, dans un mouvement qui laisse le pouvoir de fascination s’exprimer à plein. Il s’efface aussi devant l’artiste, dont il accompagne le processus créatif, donnant à voir son travail sur les matières, métal en fusion et autres, non sans instruire son rapport singulier à l’Histoire. Celle de l’Allemagne en particulier où, comme le cinéaste, Kiefer est né en 1945, et dont il n’a cessé dans son œuvre d’interroger aussi bien les mythes que la mauvaise conscience.

Démarche ayant pris, à l’occasion, un tour grinçant -voir la série Occupations (1969) où il se photographiait faisant le salut nazi dans différents sites d’Europe, manière, expliquera-t-il, de réveiller les consciences et de se dresser contre l’oubli. Aussi en prise sur la destruction et le néant, les ruines de l’Allemagne dévastée après la Seconde Guerre mondiale comme toile de fond, le film remonte la ligne du temps pour partager les questionnements de l’artiste, les fondements philosophiques de son œuvre et son rapport privilégié avec la poésie, celle de Paul Celan comme d’Ingeborg Bachmann. Une matière dense pour un documentaire jonglant avec maestria avec les formes pour mieux restituer l’ampleur de l’œuvre et la profondeur de l’homme. Étincelant.

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