Critique

[à la télé ce soir] Tueur, trader et psychopathe, l’Amérique de Bret Easton Ellis

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Julien Broquet
Julien Broquet Journaliste musique et télé

Le documentaire de Jean-Christophe Klotz loue les qualités d’observateur de Bret Easton Ellis et son style si particulier mais n’occulte pas les critiques.

« Il me poursuivra jusqu’à la tombe. Aucun autre ne recueillera une telle notoriété. J’étais pourtant persuadé que mon roman expérimental ne dépasserait pas les 5.000 ventes. » Trente ans après sa parution (il est initialement sorti le 6 mars 1991), Bret Easton Ellis parle d’American Psycho. Plongée dans le cerveau malade du trader Patrick Bateman, vision cauchemardesque de la vie à New York dans les années 80 et à l’époque, l’un des livres les plus controversés et choquants depuis un bon bout de temps. « Le mal, est-ce une chose que l’on est? Ou bien est-ce une chose que l’on fait? » Des critiques dézinguent l’écrivain et son ouvrage sur les plateaux de télé, d’autres disent qu’ils préféreraient se pendre que de le relire… « Je suis devenu le bad boy de la littérature américaine, dit-il au sujet de cette période de sa vie. Particulièrement après American Psycho . Mais c’était déjà le cas avec Moins que zéro et Les Lois de l’attraction. Le bad boy drogué et nihiliste qui se fout de tout. La jeunesse, les boîtes, toutes ces choses-là. Le sexe, la drogue et ainsi de suite. »

Tandis que l’auteur, né le 7 mars 1964 à Los Angeles, parle de son intérêt, enfant, pour les films d’horreur, de son homosexualité et de l’alcoolisme de son père ou encore de son intérêt pour New York alimenté par Woody Allen, il analyse tout le processus d’écriture de son sulfureux roman et explique comment il s’y est pris pour faire entendre la folie de son personnage principal. Et souligne que le film avec Christian Bale lui a donné une seconde vie.

« Bret Easton Ellis est un grand écrivain de l’hallucination, commente le professeur de littérature et psychanalyste Pierre Bayard. L’hallucination en raison de la drogue chez ses personnages qui sont toujours entre deux états. Mais aussi l’hallucination dans la perception du monde. À partir du moment où vous introduisez dans un livre l’hallucination, vous introduisez un dispositif de doute constant. »

Le documentaire de Jean-Christophe Klotz loue les qualités d’observateur de Bret Easton Ellis et son style si particulier mais n’occulte pas les critiques. L’avis de ceux, très premier degré, qui le taxent de misogynie et de racisme, voient dans son texte une haine des pauvres et des enfants. Insultes, menaces de mort, frilosité des éditeurs qui le lâchent (sauf en Angleterre)… Zoom passionnant sur un livre essentiel et son auteur décapant dans un monde qui aime récompenser les psychopathes.

Documentaire de Jean-Christophe Klotz. ****

Mercredi 06/10, 22h45,

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