Les stars du rock font de la pub, banal. Sauf quand Iggy Pop fait de la réclame pour une compagnie qui refuse d’assurer les musiciens…

L’ancien paria du rock de Detroit, l’ Iguane défoncé des Stooges de 1969, est – quarante ans plus tard – un homme d’affaires avisé. De sa retraite floridienne, Iggy part en pub comme il part en tournée, torse nu et convictions blindées. Criant par exemple I wanna be your dog en chanteur énervé dans une suite Louis XXL pour l’opérateur de téléphonie français SFR. En matière de réclame, la dernière apparition de la rock star sexagénaire fait pourtant désordre. Début 2009, on le voit, toujours sans t-shirt, dans un spot pour une compagnie anglaise d’assurances de voitures, Swiftcover. com. Dans son numéro désormais connu de danse du chien agité. Cela ne fait pas remuer la queue des musiciens britanniques qui dénoncent la pub comme une escroquerie en trompe-l’£il, Swiftcover. com n’acceptant pas d’assurer les… musiciens! Une douzaine de plaintes ont déjà été déposées auprès du comité de surveillance de la publicité britannique. Un représentant de Swiftcover. com explique donc que sa société n’assure pas les entertainers – musiciens, jongleurs et autres équilibristes cultureux – à cause du  » risque de blessure personnelle« . Le porte-parole, inspiré, ajoute qu’  » Iggy Pop a été choisi comme visage de la campagne parce qu’il aime la vie (sic) et non pas parce qu’il est musicien ». On notera au passage que cet « homme qui aime la vie » a passé au moins dix années à se blesser en scène, à s’automutiler et à se défoncer aux drogues dures, niveau maximal sur l’échelle de la coke et de l’héroïne. N’est-ce pas là une forme de  » risque de blessure personnelle » ? Comme on le précise dans ces cas-là, « Iggy Pop n’a pas fait de commentaires ».

La motte de beurre Sex Pistols

La pub et les stars du rock, c’est déjà une vieille affaire qui remonte aux années 50. Comme en témoigne l’album Celebrity Commercials Of The 1950s & The 1960’s où l’on peut entendre Buddy Holly faire de la retape radio pour un alcool ou Jerry « Dingue » Lewis appeler à servir le gouvernement US. Et puis, depuis la fin des sixties – Bowie faisant de la pub en 1969 pour le clavier stylophone – la contre-culture se met peu à peu au diapason du marché de l’image, pubs magazines et télés. Aujourd’hui, rien d’exceptionnel à voir Keith Richards, gratouiller sa guitare à côté d’un sac Vuitton. Ou John Lydon vanter un beurre anglais… Parfois c’est drôle, mais le plus souvent, on en sort avec l’impression terrible qu’il n’y a désormais plus de différence entre les catégories de people: joueurs de foot ou de tennis, golfeurs, acteurs, politiciens à la retraite (Gorbatchev), célébrités connues pour leur célébrité (Paris Hilton), metteurs en scène de cinéma et rock stars. Peu importe le produit, le fond, le message: tout cela file sur l’autoroute de la consommation. Pas vraiment étonnant que dans ce grand mall du consumérisme, le rock pratiqué par des gens qui par ailleurs vantent des marques, se trouve quelque peu désossé, désincarné, dépité. Iggy Pop peut continuer à s’agiter en concert mais le souffre qu’il dégage désormais est plutôt celui lié à une histoire de pub pour une compagnie d’assurances de bagnoles. Excitant, non?

DE philippe cornet

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