Non, non, non et encore non (mais…): quelques réponses à des questions posées en 2021

Tracey Ullman en reine Elizabeth II dans Death to 2020. © Netflix
Serge Coosemans
Serge Coosemans Chroniqueur

Tout au long de l’année 2021, ce Crash Test s’est posé chaque semaine beaucoup de questions. Avec le recul et à quelques jours de 2022, cette livraison S07E15 pourrait bien avoir la réponse à certaines d’entre elles… Black Mirror, OVNI, Twitter politique et James Bond: on les passe en détail! Spoiler: c’est souvent « Non »!

Q: Verra-t-on une nouvelle saison de Black Mirror en 2022?

R: Sans doute que NON.

Au tout début de cette année 2021, dans une chronique sur le programme satirique Death to 2020 concocté par Charlie Brooker pour Netflix, j’évoquais « une chose que l’on sait peu« , à savoir que ce n’était pas les showrunners de Black Mirror mais la société Endemol qui en possédait les droits « et comme il y a litige, il est aux producteurs pour le moment juridiquement interdit de lancer une nouvelle saison de la série » mais aussi à ses créateurs d’en créer de nouveaux épisodes. Un an plus tard, où en est-on dans cette affaire? Au moment d’écrire ces lignes, c’est toujours légalement bloqué. Un verdict de tribunal qualifié pourrait certes dénouer la situation d’ici quelques mois mais un Black Mirror sans Charlie Brooker et sans Annabel Jones, serait-il encore vraiment Black Mirror? Bien entendu, il existe quelques Quatrième Dimension sans Rod Serling et Gene Rodenberry n’a pas écrit tout Star Trek, loin de là, mais… On peut tout de même penser que continuer la série sans ses créateurs « historiques » et sans leur aval serait quelque peu hasardeux, du moins pour quelques années encore…

D’autant que Black Mirror est désormais liée à Netflix, tout comme le duo Brooker-Jones, qui a fondé sa propre maison de production en 2O21, Broke & Bones, et développe de son côté de nouveaux projets pour la plateforme. Des programmes plutôt « comiques », comme Death to 2020 et Attack of The Hollywood Clichés. Bien entendu, le marketing de Black Mirror a souvent joué sur l’effet-surprise et si de nouveaux épisodes ou un « special » de Noël devaient se tourner, ce serait très certainement dans le plus grand secret. Cela dit, Charlie Brooker ne semble en fait pas du tout pressé de revenir à l’écriture de scénarios dystopiques sombres, voire carrément sordides, alors que le monde traverse une pandémie qui n’en finit pas et reste pour la plupart des gens très anxiogène. C’est en tous cas ce qu’il a avoué dans pas mal d’interviews données cette année: il a bien plus envie de faire rire le public que de le déprimer, chose qu’il réussit tout de même non sans une certaine facilité. On peut aussi se demander si le fait de régulièrement imaginer depuis 10 ans des horreurs, y compris a priori grotesques qui finissent pourtant par réellement arriver ne donne pas plus mal à la tête encore que le variant Omicron…

Non, non, non et encore non (mais...): quelques réponses à des questions posées en 2021
© REUTERS

Q: Les réseaux sociaux vont-ils bientôt être interdits aux politiciens?

R: Bien sûr que NON.

Toujours en janvier 2021, dans la foulée des évènements du Capitole de Washington et de la fin de règne pour le moins agitée de Donald Trump, j’osais proposer dans une chronique une idée très provocatrice, que certains journalistes politiques ont même estimé complètement populiste: interdire les réseaux sociaux aux politiciens. Mon argument: « (Le monde) serait drôlement plus vivable si la com politique en revenait à ne plus s’exprimer que via les canaux officiels, lors de débats cadrés et sur des sites personnels sans limite de caractères. Le populisme a sa part de responsabilité dans ce qui s’est passé au Capitole mercredi. La politique du spectacle permanent et de la fausse proximité avec sa base électorale aussi. Je ne plaisante donc pas du tout en proposant d’interdire Twitter aux politiciens. Je suis en revanche prêt à leur concéder de poser de temps en temps en short sur un pédalo-canard pour Paris Match ou Closer, allez… »

Presque un an plus tard, je maintiens. J’y crois. J’assume. Je ne plaisante pas du tout. Je pense même qu’il faudrait également appliquer l’interdiction aux virologues, aux militants cyclistes et aux Twitosses qui en font des caisses et des caisses sur les pêches au thon et les pizzas aux ananas. Au début de 2021, Donald Trump a été viré de Facebook, de Twitter, de TikTok, de YouTube, de Reddit, de Twitch et même de Spotify. Or, je n’ai pas l’impression que ça a empêché Donald Trump de faire savoir au monde ce qui lui passait par le nuage de gaz de Coca-Cola Light entre les deux oreilles. Oui, sa liberté d’expression a été bafouée et oui, des entreprises privées bâillonnant le président des États-Unis relève d’un pouvoir de censure effrayant. Encore que moins effrayant qu’un président des États-Unis appelant plus ou moins ouvertement sur les réseaux sociaux à l’insurrection armée contre son successeur élu. Et qu’un parti républicain qui continue de juridiquement et politiquement miner le terrain électoral mais aussi moral en vue d’une « revanche » en 2024, comme l’explique très bien au quotidien le très bon journaliste spécialisé Corentin Sellin sur Twitter.

Interdire les réseaux sociaux aux politiciens ne serait donc sans doute qu’une mesure vaine et principalement égoïste, qui servirait surtout à aérer les neurones des autres utilisateurs mais n’aurait que peu d’incidence politique réelle. Cela transformerait aussi de facto les plateformes de fournisseurs de services en éditeurs responsables, puisque choisir qui publier et qui zapper tiendrait d’un choix éditorial. Notion de responsabilité qui semble toujours aux Mark Zuckerberg et autres Jack Dorsey ce que l’ail est aux vampires. Bref, j’en viendrais même presque à militer pour cette interdiction mais elle reste complètement improbable, totalement donquichottesque même. En 2022, Georges-Louis Bouchez aura donc toujours plus de chances d’être viré du MR que de Twitter!

Non, non, non et encore non (mais...): quelques réponses à des questions posées en 2021
© Getty

Q: Est-ce que l’on en sait maintenant un peu plus sur les OVNI?

R: NOOOOON!

Au printemps, on s’excita pas mal à l’idée que le gouvernement US soit en possession d’une preuve définitive de l’existence de vie extraterrestre. Le buzz s’était mis à considérablement enfler sur les réseaux sociaux mais aussi dans certains médias réputés sérieux à l’annonce de la publication à venir, en juin, d’un rapport très officiel sur l’état des connaissances en matière d’objets volants non identifiés pénétrant sans autorisation l’espace aérien américain. Il a même très sérieusement été avancé qu’une technologie inconnue ne faisait plus aucun doute et que l’armée était en possession de « véhicules d’un autre monde« . 6 mois plus tard, on a même percé le secret de leur propulsion: ils carburent à l’eau de boudin! En juillet, j’écrivais d’ailleurs déjà que ce que certains ufologues estimaient être des OVNI étaient selon des esprits plus critiques plus vraisemblablement des drones armés pour attaquer la police par des cartels mexicains ou des « armes volantes autonomes » telles qu’utilisées par l’armée turque pour traquer les soldats libyens. « Autrement dit, un drone militarisé capable de prendre seul des décisions de vie et de mort, sans la moindre intervention humaine. Façon Terminator, donc.« 

Je mentirais en disant que 6 mois plus tard, l’ufologie est totalement ratatinée sur les réseaux sociaux suite à ce débunkage en règle. On assiste plutôt à une véritable foire d’empoigne entre celles et ceux qui veulent continuer de croire aux Petits-Gris en vadrouille et celles et ceux qui semblent penser (comme Steven Greenstreet du New York Post) que l’armée US a en fait tenté, en gonflant le buzz OVNI, de masquer qu’elle était désormais complètement dépassée non seulement par les Chinois mais aussi par les barons de la drogue mexicains. Il est également assez évident que certains en ont bien profité pour vendre des livres et des émissions télévisées, comme d’habitude. Bref, après un court flirt bien délirant avec le mainstream, l’ufologie est en fait surtout retournée à son underground naturel. À noter que depuis quelques jours, là, maintenant, en décembre 2021, son attention s’est d’ailleurs pas mal détournée des OVNI pour plutôt s’intéresser aux anomalies dégottées sur des photos prises dans l’espace, comme cette « hutte sur La Lune » et « le disque crashé sur Mars« . Que de massives déceptions encore à prévoir l’année prochaine, donc, quand la science fera une fois de plus le ménage!

Daniel Craig et Ana de Armas dans No Time to Die (2021).
Daniel Craig et Ana de Armas dans No Time to Die (2021).© MGM/Everett Collection

Q: En sait-on un peu plus sur ce que deviendra la franchise James Bond?

R: NON, mais…

En octobre, spoilant sans vergogne, j’évoquais dans une chronique la mort cinématographique de James Bond et ce qu’elle impliquait pour la suite de la franchise. Deux mois plus tard, on ne sait toujours pas qui interprètera le personnage dans les prochains films. Barbara Broccoli, la productrice, a toutefois récemment évoqué la possibilité de donner le rôle à un acteur non-binaire, ce qui implique donc surtout la piste d’un reboot, puisque si la continuité des films avec Daniel Craig était préservée, on ne parlerait tout simplement ni du rôle de James Bond, ni, dans le cas de prequels, de la non-binarité du personnage. Quielle (haha!) que ce soit qui se retrouve dans le rôle, ce qui est donc certain, c’est que le monde de James Bond au cinéma continuera à rester indépendant du monde de James Bond en littérature.

Créateur de James Bond, Ian Fleming est mort en 1964. Dès 1968, Kingsley Amis, sous le pseudonyme de Robert Markham, publiait très officiellement la suite des aventures de 007. Un filon depuis tellement exploité qu’il existe en fait aujourd’hui plus du double de bouquins ayant James Bond pour héros écrits par d’autres auteurs que Fleming. C’est une production très inégale mais qui a surtout la particularité de complètement se foutre d’une quelconque continuité. Annoncé pour mai 2022, With a Mind to Kill d’Anthony Horowitz se présente ainsi comme une suite directe de L’Homme au pistolet d’or, bouquin inachevé à la mort de Ian Fleming, sorti à titre posthume en 1965 et adapté au cinéma en 1974. Forever & A Day, le précédent Bond de ce même Horowitz, publié en 2018, avait quant à lui pour cadre les années 50. Et plus tard, sans doute en 2023, y fera suite une trilogie contemporaine qualifiée de « Bondless Bond » par le journal The Guardian et écrite par une femme, Kim Sherwood. Celle-ci aura non seulement la particularité d’être la première autrice à sortir des bouquins dans le cadre de la franchise littéraire mais aussi à proposer une longue histoire moderne où James Bond brille par son absence. « C’est incroyable d’avoir l’opportunité d’amener ces romans dans le XXe siècle et de créer de nouveaux héros pour notre époque« , a-t-elle déclaré au journal britannique. « Mes agents double zéro tiennent de l’équipe diverse et chargée de combattre les menaces globales contemporaines, d’identifier une taupe au MI6 et aussi d’un petit problème qui est de retrouver James Bond, « Missing in Action » » (pas mort, donc). Bref, comme l’envisageait la chronique pour l’incarnation de Bond au cinéma, il est déjà permis dans les bouquins de proposer n’importe quoi depuis plus de cinquante ans. Vraiment n’importe quoi. Alors, ce Vlad Bond, le vampire qui m’aimait, ça vient, oui ou…?

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Partner Content