Critique

[Critique ciné] The Two Popes, un pur régal

Jean-François Pluijgers
Jean-François Pluijgers Journaliste cinéma

COMÉDIE DRAMATIQUE/BIOPIC | Fernando Mereilles revient sur la passation de pouvoir entre les papes Benoît XVI et François dans un film transcendé par Anthony Hopkins et Jonathan Pryce.

Automne faste pour Netflix qui, après les nouveaux films de Martin Scorsese (The Irishman) et Noah Baumbach (Marriage Story), s’apprête à diffuser, à compter du 20 décembre, The Two Popes (1), le très attendu dernier opus du cinéaste brésilien Fernando Meirelles, réalisateur de Cidade de Deus et Blindness, entre autres. Adapté de sa pièce éponyme par Anthony McCarten (auteur également de Darkest Hour, mais aussi de… Bohemian Rhapsody), le film s’invite dans les coulisses du Vatican, et débute en 2005, alors que s’ouvre la succession du pape Jean-Paul II. Deux courants s’affrontent: les traditionnalistes, conduits par le cardinal allemand Joseph Ratzinger (Anthony Hopkins), et les réformistes, emmenés par son homologue argentin Jorge Bergoglio (Jonathan Pryce). Si le premier est élu pape sous le nom de Benoît XVI, leur opposition se poursuit à distance, le second, découragé par l’évolution d’une Église coupée de la réalité de ses fidèles, présentant sa démission en 2012. À quoi le souverain pontife répond en le convoquant à sa résidence d’été de Gandolfo, théâtre d’une rencontre qui va, contre toute attente, jeter les bases de sa succession, tout en reprofilant l’institution religieuse…

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Du théologique au prosaïque

Inspiré de faits réels, le film de Fernando Mereilles en offre une interprétation toute personnelle, faisant son miel de la confrontation de deux personnalités opposées tant par leur style, à l’austère et solitaire Ratzinger répondant le jovial et chaleureux Bergoglio, que par leurs convictions profondes. C’est peu dire que la rencontre fait des étincelles, et cela qu’elle se situe dans les sphères du débat théologique, ou qu’elle glisse en terrain sensiblement plus prosaïque -le feuilleton Kommissar Rex, apprécié par le premier, ou le foot, vénéré par le second-, sans rien perdre, toutefois, de son caractère… spirituel.

Le mérite en revient à l’écriture bien sûr, mais aussi à deux acteurs en état de grâce, au point que l’on regrette parfois que The Two Popes ne s’en soit pas tenu à cette joute de haut vol où les (bons) mots crépitent et les idées fusent. Histoire, toutefois, d’ancrer son propos dans la réalité, Meirelles y a greffé les scandales -de pédophilie notamment- ayant émaillé l’Histoire récente de l’Église. Un souci légitime mais déforcé par un traitement trop superficiel. De même, les divers flash-back venus étoffer le portrait de Bergoglio, futur pape François qui, s’ils nourrissent le volet biopic du film en soulignant sa faillibilité, l’alourdissent aussi quelque peu. Bémols n’ôtant rien à la qualité de la performance d’Anthony Hopkins et Jonathan Pryce: les observer rivaliser d’éloquence et d’esprit est un pur régal…

(1) Les trois films bénéficient d’une sortie limitée en salles.

De Fernando Mereilles. Avec Anthony Hopkins, Jonathan Pryce, Juan Minujin. 2 h 05. Sortie: 11/12. Disponible sur Neflix à partir du 20/12. ***(*)

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