Critique

[Critique ciné] Richard Jewell: on a connu Clint Eastwood plus inspiré

Jean-François Pluijgers
Jean-François Pluijgers Journaliste cinéma

Eastwood revient sur l’affaire Richard Jewell, salué comme un héros ayant sauvé des vies lors de l’attentat d’Atlanta, avant d’être suspecté de terrorisme…

On ne peut contester à la filmographie de Clint Eastwood une évidente cohérence. Ainsi Richard Jewell, son nouveau film, s’inscrit-il dans la droite ligne de Sully, qu’il signait en 2016. Le réalisateur y revenait sur l’histoire (vraie) de Chesley « Sully » Sullenberger, pilote de ligne qui avait réussi, le 15 janvier 2009, à sauver les 155 passagers d’un vol New York-Charlotte au prix d’une manoeuvre audacieuse, posant son avion irrémédiablement endommagé sur les eaux de la Hudson River, aux pieds des tours de Manhattan. Un exploit dûment salué, avant que, dans un retournement de perspective, une commission d’enquête exclusivement à charge n’invite le héros à rendre des comptes.

L’action de Richard Jewell se situe pour sa part à Atlanta, en 1996. Affecté à la sécurité lors des Jeux Olympiques, Jewell (Paul Walter Hauser), un gardien au zèle exacerbé, détecte la présence d’une bombe lors d’un concert organisé en marge de l’événement. Et de donner l’alerte, sauvant au passage des dizaines de vies -circonstances faisant de cet individu effacé vivant avec sa mère (Kathy Bates) un héros national. C’est sans compter toutefois sur l’enquête du FBI, qui en vient à suspecter le vigile d’avoir monté toute l’histoire pour attirer l’attention, soupçons de terrorisme promptement relayés par une journaliste avide de scoops, Kathy Scruggs (Olivia Wilde), au mépris de la plus élémentaire rigueur. Et l’affaire de prendre un tour amer, le héros d’un jour se voyant harcelé de toutes parts, enquêteurs, médias et opinion confondus, avec pour unique recours un avocat sur le retour, Watson Bryant (Sam Rockwell).

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Essoufflement manifeste

L’individu en butte au système est la figure centrale de l’oeuvre de Clint Eastwood, qui y a greffé, depuis American Sniper, la célébration de héros américains, encore au coeur de Sully mais aussi du piteux The 15:17 to Paris. Si Richard Jewell ne dépare certes pas dans sa production récente, le film trahit cependant un essoufflement manifeste dans le chef du réalisateur vétéran (il aura 90 ans dans quelques mois). L’intrigue, confrontant un innocent à un engrenage kafkaïen, est assurément digne d’intérêt, mais la mise en scène, passée une exposition traçant du personnage un portrait contrasté, s’avère quelque peu mollassonne, le film manquant singulièrement de rythme, tandis que la sobriété tant vantée de Eastwood vire à la désinvolture. Jusqu’aux comédiens qui, à l’unisson du réalisateur, semblent évoluer en roue libre. Et l’on ne parle même pas du couplet facile sur la presse prompte à relayer des « fake news », envoi prenant, par les temps qui courent, une connotation certes pas innocente. C’est dire si l’on a déjà connu Clint plus inspiré…

Drame/biographie. De Clint Eastwood. Avec Paul Walter Hauser, Sam Rockwell, Olivia Wilde. 2h11. Sortie: 19/02. **(*)

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