Critique

[critique ciné] C’mon C’mon, de Mike Mills: l’âge tendre

Nicolas Clément
Nicolas Clément Journaliste cinéma

Sur la complicité naissante entre un adulte et un enfant, Mike Mills accouche d’une curiosité comico-dépressive au cachet très arty.

C’est ce qui s’appelle avoir de la suite dans les idées. Les dernières années de la vie de son père, sorti du placard sur le tard et explorant de nouveaux horizons sexuels à l’aune de sa septantaine, lui avaient inspiré Beginners (avec Christopher Plummer et Ewan McGregor) en 2011, soit le récit d’un deuil en forme d’introspection intime éclaté entre présent et passé. Six ans plus tard, c’est le souvenir vibrant de sa mère qui irriguait la trame de 20th Century Women, comédie douce-amère où, dans le Santa Barbara de 1979, année phare de tous les changements, un jeune adolescent s’éveillait à la complexité du monde sous la coupe iconoclaste de trois générations de femmes. Pour C’mon C’mon aujourd’hui, le cinéaste américain Mike Mills (lire notre interview) puise cette fois librement dans sa propre relation avec son enfant la matière d’un drame tendre et sincère résolument tourné vers l’avenir.

Bouclant ainsi une sorte de trilogie familiale très personnelle qui n’était pas préméditée, le film s’attache d’abord au personnage de Johnny (très sobre Joaquin Phoenix), journaliste radio qui parcourt le pays pour interroger des jeunes garçons et filles sur leur vision du futur. Mais un événement inattendu vient bientôt bouleverser le cours de son quotidien: sa soeur, Viv (Gaby Hoffmann, vue notamment dans les séries Girls et Transparent), dont il n’est pas spécialement proche, lui demande de s’occuper de son fils de 9 ans, Jesse (formidable Woody Norman), durant quelques jours. Johnny accepte de la dépanner mais n’a aucune expérience en matière d’éducation d’un enfant. S’ouvre alors pour l’adulte solitaire et le gamin sensible une étonnante parenthèse d’apprivoisement et de partage qui se nourrit de leurs questionnements respectifs, de leurs angoisses comme de leurs espoirs…

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D’égal à égal

Comme 20th Century Women avant lui, C’mon C’mon porte le label très tendance de A24, société de distribution new-yorkaise spécialisée dans un cinéma indépendant américain à l’auteurisme über cool. On lui doit notamment, ces dernières années, la sortie de films comme The Florida Project de Sean Baker, Lady Bird de Greta Gerwig, Eighth Grade de Bo Burnham, Mid90s de Jonah Hill, The Lighthouse de Robert Eggers… Ce genre, donc. Avec son noir et blanc léché, sa mélancolie rêveuse et ses tics très indie arty, le nouveau long métrage de Mike Mills, c’est sûr, ne dénotera pas au sein de ce catalogue au goût très sûr. Mais il serait injuste de réduire C’mon C’mon à son seul côté bel objet branché. Porté par une écriture impressionniste qui va chercher l’universel dans le singulier, le film construit avec beaucoup de naturel et de spontanéité un récit d’apprentissage où l’adulte apprend au moins autant, si pas plus, que l’enfant. C’est dans cette belle relation complice, d’égal à égal, que s’épanouit pleinement cette petite mignonnerie à la narration volontairement flottante, comme pour mieux épouser les plus infimes nuances de la vie.

C’mon C’mon

Drame. De Mike Mills. Avec Joaquin Phoenix, Woody Norman, Gaby Hoffmann. 1h48. Sortie: 26/01. ***(*)

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