FEMTOGO et Ptite Soeur, The Last Dinner Party, Hannah Frances, Say She She, etc : qu’est-ce qu’on écoute cette semaine?

A côté de la claque rap de FEMTOGO, Ptite Soeur et neophron, la semaine musicale accueille le second album des Anglaises de The Last Dinner Party © D.R.
Laurent Hoebrechts Journaliste musique
Julien Broquet Journaliste musique et télé

De la claque rap Pretty Dollcorpse, signée Ptite Soeur, FEMTOGO et neophron, au nouvel album des Anglaises de The Last Dinner Party (et en attendant de jeter une oreille au nouveau Tame Impala), petit tour des sorties de la semaine.

1. Ptite Soeur, neophron, FEMTOGO – Pretty Dollcorpse

Une vraie claque. Comme on n’en a plus prise depuis longtemps. Réalisé à trois –FEMTOGO et Ptite Sœur derrière le micro, et le Bruxellois neophron aux productions–, Pretty Dollcorpse est le genre de disque qui vous prend à la gorge, pour mieux vous retourner dans tous les sens et vous laisser complètement sonné. La pochette fait penser à un inédit de Marilyn Manson. Mais c’est bien de rap qu’il s’agit ici. Le rap, moins comme canon musical figé que comme mode d’expression privilégié par les déclassés. Une arme de combat pour des minorités (y compris à l’intérieur même de la communauté rap) qui y trouvent un moyen d’exploser les conventions et de donner à voir ce qui reste encore souvent planqué dans les angles morts de la société. Ici, il est question de violences sexuelles, de pédophilie, d’homophobie –«Demande au môme, ça fait quoi d’être homo, quand t’es collégien», enrage FEMTOGO (Puke something)–, de transidentité et de dysphorie de genre –«A 9 ans, j’allais me cacher pour danser dans les sapes de ma mère», se souvient l’artiste transgenre Ptite Sœur (Geiger Counter).

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Le propos est souvent cru, le ton désenchanté –«La vie, c’est que du scam, c’était pas des légendes» (Ptite Sœur sur G.McKenna). Récit white trash, prolo et drogué, Pretty Dollcorpse crache son mal-être dans les toilettes du collège ou sur des parkings déserts de province, «la boule au ventre, Opinel 6 en poche» (FEMTOGO, sur Le Môme). Halluciné, le tableau aurait pu devenir rapidement étouffant et tourner au glauque, s’il n’était peint avec autant d’intensité et de rage par les intéressés, portés par les productions iconoclastes de neophron: vrilles électro, voix déformées, boucles paranos.

Il faut attendre la seconde moitié pour que le trio se pose et baisse (un peu) la garde –la guitare acoustique de Septicémie, l’indie pop de Mirrroir. Comme si l’art –loin des diktats de l’industrie– avait permis non pas d’apaiser la colère, mais de la sublimer. Au point de redonner espoir? «Maintenant, c’est à nous de rendre le monde plus beau», glisse Ptite Sœur sur Puke Something. «Et si c’est pas plus beau, ce sera au moins plus vrai»… ● L.H.    

Distribué par SFN
La cote de Focus : 4/5

2. The Last Dinner Party – From The Pyre

Début 2024, The Last Dinner Party sortait son tout premier album, Prelude to Ecstasy. Portée par une hype comme le Royaume-Uni n’en avait plus vue depuis longtemps, la formation londonienne marquait directement les esprits, enchaînant prix (Brit Awards) et concerts sold out. Et ce, grâce à une musique rock et baroque qui ne ménage pas ses effets, portée par des musiciennes au look très victorien –corsets, jupons et crinolines.

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Dix-huit mois à peine, et quelques retours de flamme plus tard, le quintet –Lizzie Mayland, Abigail Morris, Georgia Davies, Aurora Nishevci et Emily Roberts– est de retour avec un deuxième album. Intitulé From the Pyre, il détone toujours dans le paysage musical actuel –sans jamais non plus renier la possibilité d’un tube, avec sa production FM. Ouvert par des chœurs élégiaques, Second Best cavale, là où This Is the Killer Speaking tente une sortie country-glam bombastic. Plus loin, Rifle dissimule son sous-texte politique derrière une ballade sinueuse, ponctuée d’un passage en ­français et de chœurs façon Mystère des voix bulgares. From the Pyre affirme ainsi un peu plus l’univers de The Last Dinner Party, au risque parfois de, déjà, l’y circonscrire. ● L.H.

Distribué par Universal. Le 27 février, à Forest national, à Bruxelles.
La cote de Focus : 2,5/5

3. Hannah Frances – Nested In Angles

On vous aura prévenu. Ceci n’est pas un album folk comme les autres. C’est une exceptionnelle anomalie. Une invraisemblable introspection. Une collection de chansons à la sincérité désarmante et à l’audace de tous les instants. Deux ans et demi après la sortie de Keeper of the Shepherd sur lequel elle questionnait la mort de son père, la formidable Hannah Frances publie aujourd’hui Nested In Tangles et interroge l’absence, vivante celle-là, de sa mère. L’abandon passif d’une femme qui n’était jamais disponible quand ses filles en avaient besoin…

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A nouveau fabriqué avec Kevin Copeland, Nested In Tangles ne dénote pas que par sa franchise aux prises avec les traumatismes familiaux, l’honnêteté d’une vie, d’un coeur brisé déposé sur la table. Il se distingue aussi par son univers sonore aventureux et ses arrangements ambitieux. La singer songwriter du Vermont frotte son folk intime au jazz, aux musiques expérimentales et progressives. Ses compositions déchirantes renvoient aussi bien à Nick Drake qu’à Phil Elverum, Joanna Newsom ou Grizzly Bear. Invitant d’ailleurs sur deux titres un certain Daniel Rossen… L’oeuvre excitante et bouleversante d’une artiste qui s’est construite dans la douleur.● J.B.

Distribué par Fire Talk.
La cote de Focus : 4/5

4. Say She She – Cut & Rewind

Derrière Say She She se cache le trio féminin formé par Piya Malik (aperçue au sein de El Michels Affair), Sabrina Mileo Cunningham et Nya Gazelle Brown. Une Anglaise, deux Américaines, habitant chacune dans un coin différent de l’Amérique, mais qui, ce n’est pas un détail, se sont rencontrées à New York, vers 2018 –lors d’une fête, Brown a fait connaissance avec Malik qui habitait dans le même immeuble que Cunningham, dans le Lower East Side. Leur musique trouve clairement ses racines dans l’histoire musicale new-yorkaise: plus précisément son heure de gloire disco-punk. Fan de groupes comme ESG ou Liquid Liquid, vénérant Nile Rodgers et ses tours de sorcellerie disco au sein de Chic, Say She She s’épanouit sous la boule à facettes eighties.

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Sur leur troisième album, toujours accompagnées par la section rythmique du groupe funk vintage Orgone, elles se la jouent no-wave (Cut & Rewind), soul seventies (Under the Sun, Do All Things With Love), disco de fin de nuit (Take It All) ou funk princier (Shop Boy), surfant sur la rétromania sans jamais virer au pastiche, rappelant par exemple la démarche des Anglais de Jungle. Cerise sur le disco cake, Say She She a le bon goût de redire que, sous l’extase dance, cette musique a toujours servi de bande-son à des combats politiques. Après avoir dénoncé la remise en cause de la loi Roe v. Wade sur l’avortement sur leur album précédent (le morceau Norma), le trio imagine une dystopie à la Handmaid’s Tale sur She Who Dares, tandis que Disco Life a pour décor la disco demolition night de 1979 –lors d’un match de baseball, un animateur radio avait invité la foule à brûler ses 45 tours disco à la mi-temps, dans un grand autodafé à relents homophobes et racistes. ● L.H.

Distribué par drink sum wtr/konkkurrent. Le 29 novembre, au Botanique, à Bruxelles.
La cote de Focus : 3,5/5

5. Bar Italia – Some Like It Hot

Directement inspiré par le film Certains l’aiment chaud de Billy Wilder, avec Tony Curtis, Jack Lemmon et Marilyn Monroe, dans lequel deux musiciens de jazz au chômage se déguisent en musiciennes pour échapper à des gangsters, Some Like It Hot est déjà mine de rien le cinquième album de Bar Italia. Longtemps mystérieux (et même un brin prétentieux), le trio de art rock londonien qui a publié ses premiers disques sur le label World Music, fondé par Dean Blunt et Inga Copeland, avant de signer chez les New-Yorkais de Matador, sort aujourd’hui son disque le plus accessible et catchy.

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Bête à trois têtes, cerbère de la mythologie grecque diplômé en rock indé appliqué, Bar Italia sonne de son propre aveu comme trois personnes qui se disputent. Et même là-dessus, Nina Cristante, Jezmi Tarik Fehmi et Sam Fenton ne semblent pas être d’accord… Il y a du Sonic Youth, du Cure, une touche de Pete Doherty au féminin (Bad Reputation) et plein d’autres choses là dedans… Chaud devant. ● J.B.

Distribué par Matador/Beggars. Le 29 octobre au Reflektor, à Liège, le 24 février à l’Aéronef, à Lille, et le 25 février au Trix, à Anvers.
La cote de Focus : 3,5/5

6. The Experimental Tropic Blues Band – Loverdose

«We are going to have a good time my dear friends. With the surprising Tropics of course. They are about to create more ruckus. As usual with this gentlemen, everything goes wrong…» Introduits par une intelligence artificielle (Ray Cokes s’étant fait prier) et en congé de Devil d’Inferno remplacé par des boîtes à rythmes mais toujours prêt à les rejoindre sur les routes, Dirty Wolf et Boogie Snake s’emballent sur les coups de fil commerciaux intempestifs, relient l’amour torride au réchauffement climatique et questionnent la sexualité des dauphins dans un album foutraque bricolé comme les premiers Beck. Un mélange poisseux de rock et de rap qui lorgne du côté de Run DMC et de Warmduscher, évoque le Villejuif Underground, semble adresser un clin d’œil à 2 Unlimited (The Escape Game) et n’hésite pas à égratigner les grands de ce monde. Tonnerre sous les Tropics… ● J.B.

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Distribué par JauneOrange. Le 14 novembre au Rockerill, à Charleroi, le 15 novembre au Botanique, à Bruxelles, et le 22 novembre au Kultura, à Liège.
La cote de Focus : 4/5

7. Tuff Guac – I Want It too

C’est l’un des trésors les mieux cachés et des projets les plus irrésistibles de notre rock indé. Un remède à la dép automnale, aux coups de mou et au cafard. Un an et demi après l’irrésistible Swanky Love, Tuff Guac balance I Want It Too. Une nouvelle cargaison d’aide humanitaire. Treize pilules du bonheur pour retrouver le sourire et bronzer avec son chapeau de cowboy.

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Epaulé sur scène par Wim De Busser aka King Dick, Jasper Suys alias Jerry Lada et Gert-Jan Van Damme, Rafael Valles Hilario a encore une fois écrit, joué, enregistré et mixé son album tout seul comme un grand. Il y confirme ses talents de songwriter, son sens de la mélodie infectieuse et de la chanson euphorisante. Gaz Coombes du plat pays, Marc Bolan anversois, Hilario joue dans la cour de Supergrass et de T-Rex, du Villejuif Underground et des Kinks… Imparable. ● J.B.

Distribué par Belly Button Records. Le 17/10 au Djingel Djangel (Anvers), le 14/11 au Café Café (Hasselt), le 16/11 au 4AD (Dixmude) et le 20/11 au Trefpunt (Gand).
La cote de Focus : 4  

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