Nicolas Simon

« Les artistes sont des travailleurs (presque) comme les autres »

Nicolas Simon Membre de l'association Hors Champ

L’association des métiers du cinéma et de l’audiovisuel Hors Champ s’insurge face aux propos tenus par le député N-VA Wouter Raskin sur le site de Bruzz, qui fustige notamment le nombre « suspect » d’artistes bruxellois.

L’article publié le 9 décembre sur le site de Bruzz en a fait bondir plus d’un de sa chaise. Insinuant que trop d’artistes bruxellois avaient droit aux allocations de chômage (« Sont-ils tous de vrais artistes? »), le député N-VA Wouter Raskin s’est attiré les foudres d’un secteur qui a toujours la réforme du « statut d’artiste » de 2014 en travers de la gorge. D’autant plus que, comme le souligne cette réponse traduite du néerlandais par DaarDaar, il ne faut pas être un spécialiste pour se douter que la concentration d’artistes est plus importante dans les grandes villes comme Bruxelles.

Ci-dessous, nous publions sous forme de carte blanche la réponse de Nicolas Simon, membre de Hors Champ, association connue notamment pour ses coups d’éclat lors des Magritte du cinéma.

Non seulement ce mandataire N-VA dit des grosses bêtises, mais en plus le journaliste ne fait pas son travail: vérifier les faits, et apporter un éclairage alternatif, pour tendre à l’objectivité. Cet article est une tribune pour la N-VA, pas du journalisme!

Cet article est truffé de contre-vérités et d’omissions:

1. Les artistes (et les techniciens) ne sont pas des chômeurs. Ce sont des travailleurs intermittents.

2. Dire que « le statut d’artiste offre des allocations de chômage » est faux. Il n’est dit nulle part dans cet article que l’accès aux allocations de chômage est exactement le même pour les artistes que pour tous les travailleurs salariés (312 jours de travail sur 21 mois pour les moins de 36 ans, 468 jours en 33 mois de 36 à 49 ans, 624 jours en 42 mois à partir de 50 ans). Il faut le souligner: les intermittents du secteur culturel travaillent dur pour accéder aux allocations de chômage, comme tout le monde, point.

3. Dixit: « Le même montant d’allocations est maintenu plus longtemps parce que le statut d’artiste n’est pas exempté du caractère dégressif des allocations. »

Alors là c’est une faute de grammaire: double négation = affirmation. La non-dégressivité est bien le coeur du « statut »: les maigres allocations ne diminuent pas après un an, c’est ce qu’on appelle la « protection de l’intermittence », ou « période protégée ». Pour rappel, pour accéder à cette « période protégée », il faut à nouveau prouver 156 jours de travail sur 18 mois, dont au moins 104 dans des activités artistiques ou « techniques dans le secteur artistique ». Cette condition, introduite par la réforme du « statut » de 2014, a interdit l’accès à la « protection de l’intermittence » à de nombreux artistes et techniciens.

4. Dixit: « Un nouveau resserrement des règles est nécessaire. »

Alors là, on est bien dans l’air du temps, dans la post-vérité. La N-VA fait de la démagogie sur le dos des intermittents, en essayant de faire croire que les artistes sont des profiteurs.

Comme si la réforme de 2014 ne suffisait pas? Cette réforme de 2014, qui a drastiquement durci les conditions pour accéder au « statut », empêche souvent les jeunes d’accéder à la protection de l’intermittence. Ces jeunes professionnels, doublement précarisés par la nature intermittente de nos métiers, et par l’impossibilité d’accéder au « statut », sont en grande difficulté. Une génération sacrifiée sur l’autel de l’austérité?

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