Le mot d’ordre du Festival Kanal: interaction?

FocusVif.be Rédaction en ligne

Du 13 au 16 septembre, le mouvement citoyen Platform Kanal a essayé de transformer le canal bruxellois en un point de rencontres et d’échanges. L’idée était d’attirer les gens dans un quartier habituellement délaissé. Le bilan est mitigé.

Tout le long de l’eau, des abattoirs d’Anderlecht jusqu’au Square Sainctelette, se tenaient de multiples installations dans le cadre du Festival Kanal. Leur but? Faire venir un public qui d’habitude ne se promène pas dans ces coins-là, et lui faire rencontrer ceux qui peuplent ces rues au quotidien. Seulement voilà, les quelques visiteurs, amateurs d’art pour la plupart, et légèrement bobos, ont très vite eu l’air d’un groupe de touristes en plein safari urbain. A priori, la population n’a pas été mise au courant de ce qu’il se passait à côté de chez elle. Si bien que lorsqu’un groupe se masse devant une projection au marché des abattoirs, un homme travaillant à côté leur lance « Et quoi là, il y a une fête? » Pour l’aspect mixité, on repassera. Dans le quartier, peu d’affiches annoncent le festival. Aucun marquage au sol pour guider le quidam. Une signalisation trop rare qui fait passer l’évènement presque inaperçu à certains endroits.

Heureusement, la plupart des artistes, tout du moins ceux dont on a pu voir les installations, ont pour priorité d’intégrer l’humain au coeur du projet. Par exemple, Honoré d’O, artiste belge, met en place un fil qui tombe du ciel. Interrogés sur le « pourquoi du comment », les passants sont amenés à échanger sur le sujet. Pour les curieux, l’astuce est un fil de pêche tendu entre deux immeubles, assez haut pour ne pas être vu par l’oeil humain, auquel est accroché un autre fil, visible celui-ci. Effet garanti. Une autre idée, celle de Thomas Laureyssens, consiste à installer une sorte de défibrillateur dans un abri bus. Pour le faire fonctionner, six personnes doivent poser en même temps leurs mains sur des capteurs. Le but étant d’amener les gens qui attendent le bus à, pour une fois, interagir.

L’artiste a également installé, Parc Quai à la Houille, une balançoire géante à quatre sièges qui fait de la musique selon les mouvements que l’on lui donne. A notre arrivée devant l’installation, des enfants du quartier se balancent frénétiquement sans prêter attention à la musique qu’ils produisent, par ailleurs étouffée par le bruit des voitures. Le concepteur, déçu, nous explique que son oeuvre doit normalement amener les gens à essayer de composer une mélodie. On soulève ici une des failles du Festival Kanal. Les installations sont faites pour amener les gens à visiter le quartier, moins pour que les riverains eux-mêmes en profitent.

Stephan Goldrajch est un des rares à avoir remis les habitants au coeur de leur quartier. Avec lui, ils ont inventé une légende urbaine autour du canal qu’ils essayent de propager pour lui donner une dimension poétique. L’artiste est allé frapper chez tous ceux qui vivent le long du canal pour leur demander s’ils voulaient bien accrocher un patchwork à leur fenêtre, nouveau symbole du quartier dessiné par leurs soins.

Hormis quelques initiatives comme celle-ci, le Festival Kanal a apparemment oublié d’intégrer la population à son projet. Si, grâce à cette initiative, le canal n’est plus une frontière géographique dans le quartier, il reste bel et bien une frontière culturelle entre résidents et gens de passage.

Leslie Meuraillon (stg)

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Partner Content