Discours à la nation, « comme une gifle au goût du public »

Nurten Aka
Nurten Aka Journaliste scènes

Ils ont cassé la baraque à l’ouverture du Festival de Liège: le Belge David Murgia mis en scène par l’Italien Ascanio Celestini. Aventure inédite avec Discours à la nation, du « pur » Celestini.

Discours à la nation les 23 et 24 janvier au théâtre de l’Ancre à Charleroi (www.ancre.be), du 23 avril au 4 mai à Bruxelles, au Théâtre national (www.theatrenational.be).
www.festivaldeliege.be

Le texte sautille et passe (faussement) du coq à l’âne. On y parle de guerre et de pluie, de Gramsci et de Lybie, des putes de la Volga, de la fabrication du pain et de la faillite des entreprises… Imprévisibles, les fables de Celestini se déroulent dans la folie du monde, avec une pensée en mouvement qui drôlement se partage. Imparable, Celestini peut évoquer le déterminisme social avec l’histoire d’un homme qui possédait un parapluie (probablement depuis des générations) et un autre qui n’en possédait pas (probablement depuis des générations). Tirant ouvertement sur nos sociétés démocratiques, avec ses dominants/dominés, son Discours à la nation est un savoureux spectacle de… sociologie politique sortie des sentiers battus, truffée d’anodines histoires, écrites comme une partition musicale, avec couplets et refrains. Souvent, il conte lui-même, assis sur une chaise, en logorrhée à italienne, ultra-rapido, avec les mains de préférence. Imparable.

David Murgia, jeune mais grand

Sauf que cette-fois-ci, il a filé son texte au jeune comédien David Murgia qui a relevé brillamment le défi de ne pas faire du… Celestini, injectant sa propre vitalité au texte. Quel talent! Là où Celestini conte, Murgia joue la parole, plus d’une heure durant, en déplaçant quelques cageots et loupiotes, interpellant son bassiste Carmelo, se posant sur une tribune improvisée, se limant les ongles ou encore s’entrainant à discourir, ce qui nous vaut une scène hilarante démontrant la fabrication séductrice des discours politiques. Une vraie prouesse d’acteur où Murgia s’approprie des notions casse-gueule qui passent la rampe de l’époque. Faut voir ce jeune « patron-tribun » déterrer la lutte des classes, l’aliénation, le prolétariat, le sous-prolétariat… s’en moquer devant le prolétaire embourgeoisé que nous sommes. Merci la social-démocratie. Rassurez-vous: pas de théorie, que des histoires, celle du revolver, celle du concierge, celle du général à la retraite, du pain et des miettes… La pilule est efficace.

Sur scène, Carmelo, guitare basse et lunettes noires, gratte sur cette parole folle, s’arrête sur son pic, reprend au fil des discours de David Murgia, qui se déplace, allègre, sans fausses notes dans un texte ardu, drôle et politique qu’il arrive à faire sien sans jurer de rien. On reste impressionné par le talent de ce jeune comédien de 24 ans, formé au Conservatoire de Liège, seul en scène pour la première fois… qu’on retrouvera prochainement dans au Théâtre National avec le tube Le signal du promeneur et au cinéma dans Je suis supporter du Standard, premier long métrage de Riton Liebman. Un talent à suivre.

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