Critique

[Critique ciné] Triple 9, film de genre tendu et violent

Kate Winslet dans Triple 9 de John Hillcoat. © DR
Louis Danvers
Louis Danvers Journaliste cinéma

FILM POLICIER | Entre flics et voyous, peu de différences dans ce polar aux accents de film noir ultra-réaliste.

La grande ville comparée à une jungle, une jungle d’asphalte. La formule s’affichait en titre du roman de William R. Burnett, publié en 1949 et porté à l’écran dès l’année suivante par John Huston pour faire un classique instantané du film noir(1). Cette formule The Asphalt Jungle s’applique idéalement au film de John Hillcoat, un polar sombre et prenant, déchaînant une violence sans borne sur fond de corruption et de partie de cache-cache fatal entre flics et voyous. Les premiers souvent ripoux, les seconds toujours implacables, tous dépourvus du moindre scrupule éthique, humain. Une jungle, oui, cadrée en mode réaliste au grain âpre et brutal, bien dans la manière du réalisateur qui sut si bien adapter naguère le grand roman post-apocalyptique de Cormac McCarthy The Road.

Le triple 9 du titre, c’est le chiffre d’appel à composer pour signaler aux collègues qu’un policier est tombé en action et les rameuter en nombre pour lui venir en aide. Des flics, on en verra au tapis, parfois définitivement. Regarde les hommes tomber, pour citer un autre grand film noir, français celui-ci(2)… La chute n’étant pas que physique mais aussi et peut-être surtout morale, dans un environnement où la corruption opère des ravages, où il devient parfois très difficile de distinguer les représentants de la loi des gangsters auxquels ils sont censés s’opposer…

Triple Heat

Atlanta est une des villes possédant la plus forte croissance aux Etats-Unis. De quoi intéresser le monde des affaires (un nombre important de multinationales y ont établi leur siège), mais aussi celui d’une pègre internationale aux ambitions féroces. Une mafia russo-israélienne, commandée par une femme de caractère (surprenante Kate Winslet), y tient sous sa coupe quelques flics corrompus. Contraints à effectuer pour elle une mission très délicate et dangereuse, les ripoux ne verront qu’une solution pour parvenir à leurs fins: piéger un jeune collègue (Casey Affleck) pour qu’un appel codé 999 expédie toute la police ou presque à sa rescousse, leur laissant ainsi la voie libre… Un sale plan, aussi crasseux moralement que prometteur de sanglants développements. John Hillcoat et son scénariste Matt Cook créent un microcosme glauque et cynique à souhait, que le premier nommé met en images façon Heat. Sans atteindre le niveau du film de Michael Mann, Triple 9 s’inscrit bien dans la tradition du polar sombre et ambigu. Son interprétation n’est pas la moindre de ses qualités. Outre Affleck et Winslet déjà cités, on retrouve avec plaisir Chiwetel Ejiofor (12 Years a Slave), Anthony Mackie (The Hurt Locker), Woody Harrelson (Larry Flint) et deux transfuges de la télévision: Aaron Paul (le complice de Bryan Cranston dans Breaking Bad) et Norman Reedus (le charismatique Daryl Dixon de The Walking Dead). Un ensemble convaincant, pour un film de genre tendu et violent. ˜

(1) Quand la ville dort est son titre français.

(2) Regarde les hommes tomber de Jacques Audiard (1994).

De John Hillcoat. Avec Casey Affleck, Anthony Mackie, Kate Winslet. 1h56. Sortie: 23/03.

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